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2 octobre 2013 3 02 /10 /octobre /2013 10:13
DSCN3483.JPGDans les éditions grenobloise et lyonnaise du "Petit Bulletin" d'aujourd'hui, mercredi 2 octobre - et, en version complète, sur le site de l'hebdomadaire gratuit (lire ci-dessous)-, l'interview de Loïc Merle pour son premier roman, "L'Esprit de l'ivresse" (Actes Sud), par Nadja POBEL.
Merle frondeur
Entretien - portrait publié le Vendredi 27 septembre 2013 par Nadja Pobel Petit Bulletin n°726 consulté 71 fois

C’est sur une place familiale et tranquille de Lyon, à deux pas de l’Institut Lumière, que nous rencontrons Loïc Merle en plein été indien, dans un contexte bien plus calme que celui qu’il décrit dans son premier roman, "L’Esprit de l’ivresse". Inspiré par les émeutes de 2005 à Clichy-sous-Bois, il écrit une fiction où la mort - accidentelle ou non - d’un vieil homme fait s’enflammer la cité des Iris et mène à la révolution.

Interview. Propos recueillis par Nadja Pobel

 

L'Esprit de l'ivresse a été ouvertement inspiré par les émeutes en banlieue de 2005. Est-ce cet événement qui vous a donné l'envie d'écrire ou est-ce antérieur ?

Loic Merle : C’est toujours un sujet qui amène à écrire. J’avais envie d’écrire avant mais cet événement a été le déclencheur de quelque chose d’un peu construit, qui dépasse une page. Avant j’écrivais plutôt de la poésie. L’objet est moins important. Ca peut être plus éphémère, volatile. Là j’ai pu construire un roman.

Vous viviez en Allemagne quand vous avez rédigé ce livre. Est-ce qu’il vous fallait cette distance (géographique) pour écrire ?

Je n’ai pas eu l’idée d’écrire dessus tout de suite car ça ne m’est arrivé directement, j’étais plus témoin ou spectateur. Ca paraît difficile d’écrire tout de suite dessus, surtout dans un contexte médiatique où on dit beaucoup de choses, avec beaucoup de brouhaha. À l’étranger, avec la distance, le sujet s’est imposé à moi. Ca a continué à me poser question. On peut le comprendre intellectuellement parlant mais c’est autre chose de le ressentir, et je voulais mettre des mots sur ces sensations que j’avais eues.

D’un fait très réel et très commenté, vous faites une fiction. Là encore, vous aviez besoin de la distance de la fiction pour appréhender ce fait-là ?

La réalité/fiction n’est pas une opposition pour moi. Je pense que la fiction est une continuité, elle crée un autre monde qui n’existe pas forcément. Si la fiction n’est pas en continuité avec la réalité, elle n’a d’intérêt pour personne. Et c’est autre chose d’écrire à l’étranger car il y a un autre rapport à langue tout bête. La langue allemande est construite de manière très différente de la langue française donc il n’y a pas de passerelle immédiate. De plus, j’étais assez isolé, dans un coin de l’Allemagne qui n’attirait pas mes amis. Cet isolement pousse au travail.

Votre roman a une forme romanesque avec des phrases amples, longues, peu de chapitres ou paragraphes, des enjambements… On a vite le sentiment d’être sous le gaz lacrymogène. Vous souhaitiez donner une belle langue à des faits très abrupts et difficiles ?

On écrit comme on écrit. Il ne faudrait pas que les lecteurs s’imaginent qu’on fait exprès d’avoir telle ou telle langue. Bien sûr on peut se dire qu’on va édulcorer son écriture pour être plus accessible mais la plupart des personnages dont je parle n’ont pas beaucoup de pouvoir, ils ne sont pas connus, ils sont un peu ballottés par les événements. Je ne vois pas pourquoi on en parlerait avec une langue pauvre. Moi j’aime bien donner tout ce que je peux à des personnages. Je ne vois pas pourquoi on parlerait des gens pauvres avec une langue pauvre.

Vous cherchiez à leur redonner leur dignité ?

Non, car comme dans la vie quotidienne, on peut être avec des gens plus ou moins riches ou socialement dotés, on se rend compte qu’on n’a pas de dignité à leur redonner, c’est une question de regard. La dignité ils l’ont ou ils ne l’ont pas mais ce n’est pas moi qui vais décerner des bonnes notes ou des mauvaises notes. C’est vraiment une histoire d’éclairage. Si on prend le champ de la littérature française : quel roman parle d’émeutes ? Il n’y en pas énormément. Peut-être dans la littérature du XIXe, qui pouvait être très émeutière ou révolutionnaire avec Hugo, Flaubert, qui ont des scènes de ce genre, mais aujourd’hui ça n’intéresse plus personne. Moi je voulais proposer un éclairage là-dessus. Il n'y a plus de scènes de grèves dans la littérature française, c’est devenu des scènes de genre, mais les émeutes n’y sont pas. Or, à mon sens, ce n’est pas nouveau, c’est cyclique, et il faut bien que quelqu’un prenne en charge ça aussi. Je ne suis pas un spécialiste de la littérature française mais, à mon sens, il y avait un déficit de ce côté-là. C’est exactement le même résonnement que j’ai tenu pour la figure du Président. Il y a très peu de figures de Président dans la littérature française car il y a cet axiome qui dit que la politique est sale et qu’elle n’a rien à faire dans un roman.

On pense au film L’Exercice de l’Etat en vous lisant. On voit comment la vie intime de l’homme de pouvoir interfère avec ses fonctions.

On m’a dit parfois que j’avais fait un roman sur la violence mais c’est faux. C’est un roman sur le pouvoir, sur les pouvoirs qu’on peut avoir ou qu’on n’a pas, qu’on lâche ou qu’on remet dans les mains d’un seul homme. Mais comment on peut penser que ce n’est pas inhumain de remettre autant de pouvoir dans les mains d’un seul homme ou, plus rarement d’une seule femme ? La violence découle de ce pouvoir-là ou du pouvoir qu’on n’a pas, du fait de se sentir impuissant à changer quoi que ce soit donc parfois certains brûlent une voiture...

Vous montrez d’ailleurs que la révolution tient à très peu de choses. Les grandes actions des grands hommes se composent de leurs petites et grandes blessures intimes.

C’est un mélange. Quelle différence y’a-t-il entre votre corps et le corps de l’Etat, entre votre esprit et l’esprit de l’Etat ? C’est très difficile à déterminer. Et plus vous restez au pouvoir longtemps, plus c’est difficile de faire la part des choses.

C’est pour ça que votre Président prend la fuite ? Parce qu’il n’a pas anticipé, qu’il ne sait pas quoi répondre ?

Oui mais c’est précisément le sens de la crise. On m’a dit que ça pouvait être naïf mais le problème est que les gens qui font ce genre de commentaires ne s’aperçoivent pas qu’une crise c’est juste l’inattendu qui déboule dans un quotidien où tout est balisé, où tout est sous contrôle mais le problème est que ça va arriver un jour ou l’autre. Toute personne qui a étudié la science politique sait que ça va arriver, que d’un coup, on se retrouve avec des effondrements de l’Etat qu’on n’a pas prévu parce qu’on ne savait pas que c’était miné de part en part. Si la légitimité du pouvoir ou du Président se réduit à une toute petite place, que plus personne ne les reconnait, alors il suffit de pas grand-chose pour que tout bascule et qu’un Président prenne la fuite parce qu’il a peur, qu’il évalue mal la situation, qu’il est mal conseillé…

On compare souvent cette action dans votre livre à la "Fuite de Varennes" mais, il y a deux ans, Ben Ali, tout despote qu’il était, est devenu tout petit et a pris la fuite quand le pays basculait.

Je n’ai pas pensé à Ben Ali car j’étais en train de finaliser le livre à ce moment-là. Pour le dire clairement les émeutes de 2005 se sont arrêtées parce que les gens ont décidé d’arrêter, ne savaient plus quoi faire d’autre. Or il y a de nombreux témoignages qui montrent que les gens ont regretté de ne pas avoir organisé une marche dans les centres des grandes villes. J’ai découvert ça après avoir écrit ces scènes-là. Il se trouve qu’à partir du moment où on décide de faire quelque chose d’inattendu, il va y avoir une crise, quelque chose ne va plus marcher. Et si quelqu’un un peu enfermé dans son palais ou son pouvoir voit ça de très loin, il peut paniquer alors que il n’y a aucune raison a priori, il n’est pas menacé physiquement mais il sent que le sol se dérobe sous ses pieds.  Quel consentement donne-t-on au pouvoir ? Avec le Président actuel dans la situation actuelle on voit bien que ce n’est pas parce qu’on a voté pour quelqu’un qu’on ne le conteste pas quinze jours après. Donc cette situation d’émeute ne me parait pas invraisemblable. Vraiment. Et ça d’autant plus qu’on considère que les gens qui mènent ces actions dans le roman sont des gens des banlieues donc des sauvages. Plus il y a de clichés sur les gens, plus on s’éloigne d’une connaissance quelconque et plus on en a peur. Plus on en a peur, plus on risque de faire des choses motivées par la panique.

Dans votre roman, il se passe quelque chose, le mouvement révolutionnaire se met en marche. C’est votre manière de combler le silence qui s’est imposé dans la réalité ?

Ces émeutes sont passées comme un rêve. Là on en parle encore cycliquement par rapport à des comptes-rendus de justice ou pour Zyed et Bouna, mais un silence s’est installé. Personne n’a assumé ces émeutes. Mais quelque chose s’est produit et ce n’est pas parce qu’on le refuse que c’est une réalité qu’on peut mettre sous le tapis. Un silence s’est installé mais il était sous-tendu par des tas de choses. Une fois qu’on a participé à des émeutes, qu’on se soit fait pincer ou pas, quelque chose dans votre vie a changé. On en parle comme on veut, on a l’avis qu’on veut dessus mais on ne peut pas faire comme si c’était normal.

Quand on vous entend parler, on pourrait se dire que vous avez écrit un livre sociologique voire historique. Or ce n’est pas du tout ça. Comment avez-vous choisi vos personnages ?

Le genre romanesque est très bâtard et c’est ce qui me plait. On peut ajouter des tas de choses qui vont s’amalgamer plus ou moins bien. Le personnage central de Clara m’est venu car je voulais parler d’une jeune fille d’aujourd’hui, de vingt ans, qui traîne dans la rue, savoir ce qu’elle pense. Juste parler de ça, simplement. Le Président était important en miroir des émeutes. C’est un personnage qui souvent n’existe pas. On ne s’en préoccupe pas ou on espère qu’il n’ait pas trop d’influence pour qu’on continue à mener nos petites vies dans notre coin mais la vérité est que c’est un personnage qui est dans nos vies qu’on le veuille ou non, dont on entend parler, dont on connaît le nom, qu’on ait voté pour lui ou non. À quoi correspond ce pouvoir de pénétrer toutes les vies ?

Vous auriez pu choisir de rester dans la banlieue des Iris. Avec ce personnage, vous décalez géographiquement le lecteur, c’est une autre sphère.

Sur une crise c’est intéressant de voir les tenants et les aboutissants. On m’a taxé de naïveté avec ce personnage mais la naïveté est de ne pas s’en préoccuper, c’est de penser qu’on peut faire des émeutes ou des petits mouvements politiques dans notre coin, que les personnages peuvent faire ce qu’ils veulent sans que quelqu’un à l’autre bout de la chaîne ne s’en préoccupe. Ce n’est pas vrai, alors allons voir les réactions de ce personnage-là. Je ne voulais pas traiter la banlieue comme un lieu particulier même si c’est un lieu particulier. Il y a des parallèles entre la figure du monsieur Chalaoui (celui qui meurt au début du livre,NdlR) et le Président. Ils ont le même âge. L’histoire n’appartient pas qu’aux grands hommes. Elle peut appartenir à un vieux de banlieue de soixante-trois ans.

Vous montrer aussi que la révolution, qu’on théorise beaucoup, est avant du tout de l’ «anxiété nouvelle», qu’on voit le basculement rétrospectivement.

Oui, c’est un des moteurs romanesques. On attend le changement et en même temps, on ne peut pas le précipiter. Je parle du vrai changement, pas de celui qu’on nous vend de manière publicitaire ou politique. Mais le vrai changement opère lorsqu’on bascule d’une société à l’autre. Après on constate, on réfléchit dessus, on le nie ou pas. Tout le monde s’accorde pour dire qu’on a basculé dans autre chose après le 11-Septembre. Je ne crois pas que c’était prévisible. Tout comme ces trois semaines qui ont enflammé la France entière. Pareil pour la révolution. Et c’est mieux si on ne joue pas à l’avant-garde du prolétariat en disant «Nous on va vous expliquer comment ça va se passer». C’est mieux si les gens se prennent en main ou pas.

Vous parlez des détrousseurs qui profitent de la Révolution en pillant des magasins et vous pointez une certaine catégorie sociale, des gens qui sont peut-être banquiers aujourd’hui.

C’est difficile de s’abstraire du roman. Dans le livre, je voulais montrer que n’importe qui peut être poussé au pillage dès lors qu’il ressent un manque même si ce manque est le plus ridicule du monde, et que le contre-révolutionnaire d’aujourd’hui peut devenir le révolutionnaire de demain. Ou l’inverse. Et que le changement, c’est ça : ça brasse les positions, les situations. La révolution est un mélange des choses. Est-ce que ça va finir mal ? Sûrement. Est-ce que c’est un mal nécessaire ? Oui.

Vous le craignez ?

Je n’ai rien à craindre spécialement.

Une situation qui s’enflamme fait des dégâts collatéraux...

Oui mais tout a un prix.. Dès que vous achetiez quelque chose, ça a un prix. Est-ce que ça vaut le coup ? Je ne vais pas décider de ce qui vaut le coup ou pas. Ce n’est pas à vous, ni à moi, ni a personne de décider individuellement de ça. C’est très important de restituer une dimension collective aux choses. Est-ce qu’il vaut mieux tous fonder un parti, participer à des élections plutôt que d’aller investir la rue ? Je ne sais pas, je n’ai pas de réponse à ça.

Ca peut être les mêmes.

En tant que romancier, je n’ai pas à répondre à ça. Je ne suis pas spécialiste. J’ai été dans le milieu politique et j’ai tellement entendu des gens se prendre pour Lénine ou Mao… ou de Gaulle. On se portera tous mieux si on prend en charge collectivement plus de choses.

Mais votre livre montre que c’est par des initiatives personnelles que les choses avancent, sans attendre de se reposer sur une figure tutélaire. Ce n’est pas une masse informe. C’est Clara…

La masse n’existe pas, comme la foule. Ce sont des choses qu’on invente quand on n’en fait pas partie ou qu’on est jaloux des gens qui habitent en banlieue – ça existe – par rapport à une certaine solidarité. Et en même temps, ils veulent être individualistes dans leur petit coin mais aimeraient bien qu’on se parle entre voisins. Mais on ne peut pas tout avoir. La solidarité, le fait que dans certains endroits, à la périphérie, les gens soient plus soudés pour des bonnes ou des mauvais raisons, a un prix. C’est ce que je voulais montrer sans dire si c’est bien ou mal. Mais est-ce que ça vaut le coup de le payer ? Est-ce qu’on est dans un système tout bloqué où quel que soit votre mérite vous ne pouvez pas prétendre accéder à certaines responsabilités ou certains postes parce que ce n’est pas comme ça que ça marche ? Est-ce qu’on peut faire progresser ça ? Ou est-ce que tout est bloqué et mènera à une crise ?

Pour autant vous faites un exercice très solitaire. Vous être écrivain...

Je n’ai pas dit que ce n’était pas paradoxal mais plutôt que de cacher cette ambigüité-là entre la solitude de l’écriture et le fait d’avoir envie de participer à quelque chose de plus collectif, j’ai choisi d’en faire un moteur. Un de mes propos est de montrer l’ambiguïté entre individuel et collectif. Comment c’est possible. C’est une ambiguïté très contemporaine.

C’est votre premier roman mais surtout un roman que vous avez voulu comme «le plus beau du monde»...

Oui mais je ne comprends pas que ce ne soit pas la norme, qu’on puisse faire un premier roman simplement pour faire le deuxième, le troisième, et en disant «Je vais faire carrière là-dedans». Je ne sais pas si je voulais faire un roman ambitieux mais je voulais faire un roman honnête, et l’honnête implique de ne pas garder de la réserve, quitte à aller à rebours de la tendance contemporaine qui est de faire des livres de 150 pages écrits très gros. Ce n’est pas mon premier roman, c’est MON roman. Je n’avais pas l’ambition d’écrire un premier roman pour poser mes jalons. C’est quand même incroyable de voir cette règle non-écrite qui dit qu’il fait attendre neuf romans pour avoir le Goncourt. C’est long. Mais écrire me prend du temps, de l’énergie, de la disponibilité d’esprit. Ca me prend tout ce que j’ai. Je m’y prends mal sûrement ! Mais je ne comprends pas que ça puisse ne pas tout prendre.

 

Crédits photo : © Melania Avanzato

Les romans à ne pas manquer, les auteurs à découvrir.(7 articles parus dans ce dossier)


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Ces révolutions que

nous n'avons pas vu venir

   De retour à Bény, en ce bel hiver de givre, je relis cette carte postale que mon père garde, avec celles des étés précédents, sur le buffet de la cuisine. "Sous le ciel encore chaud de la Tunisie, nous pensons bien à toi. Ici, on ne se croirait pas à la veille de la Toussaint. À bientôt. On t'embrasse". Des mots tout simples, écrits comme toujours à la hâte, au moment de reprendre l'avion. 

   C'était à peine trois mois plus tôt. Du Cap Bon où nous faisions halte, nous avions effectué de cahotants trajets à travers le pays. Le Temple des eaux au pied du djebel Zaghouan. Le site romain de Dougga, pur poème de pierre, de vent et d'oliviers, où Abdallah, notre guide, nous avait imposé une visite pour le moins exhaustive. Les villages poussiéreux où la population s'ennuie sous les palmiers flétris. Les charrettes, les bourricots, les antiques mobylettes. La pauvreté, la dignité et, pensions-nous, la résignation.

     La résignation? Eh oui, même lorsqu'on est le témoin d'un régime sans ambiguïtés, il n'est pas toujours si simple de pressentir l'histoire en marche. Avec le recul, pourtant, il y avait eu des scènes éloquentes. Ces barrages de police un peu partout, justifiés alors par un enlèvement d'enfant. Ce jeune diplômé quêtant quelques dinars dans les majestueuses ruines de Thuburbo Majus et qui se cachait pour aborder les "nantis" que nous étions à ses yeux. Un feu couvait en lui, c'est sûr. Il n'aurait peut-être pas fallu grand-chose pour qu'il parle. Mais nous étions pressés, comme souvent.

     Et, disons-le aussi, la méfiance nous gagnait. Un soir, du côté de la cité viticole de Grombalia, un 4X4 aux vitres fumées avait rattrapé notre "Symbol" de location. Une impression se confirmait: nous étions suivis. Sans doute vaut-il mieux ne pas écrire "journaliste" à la rubrique "profession" sur les fiches de douanes à l'arrivée lorsque, quelques mois plus tôt, on a utilisé le mot "dictature" pour rendre compte de la dernière parodie de réélection présidentielle au palais de Carthage.

     Les touristes européens flânaient dans les souks. Les cornes de gazelles étaient sucrées, le vin gris de Mornag montait à la tête, octobre avait de superbes rousseurs de désert et la tiédeur des plages invitait à fermer à demi les yeux. Que voulez-vous, c'est comme ça: exportées sur place, les plus solides notions de droits de l'homme se dissolvent parfois dans le bleu de la mer...

     Pour notre part, nous aurions dû prêter davantage attention aux ardents regards noirs de toute une jeunesse rivés aux téléphones portables. La "génération Ben Ali dégage!" préparait, dans la retenue, le grand soir arabe. Le fantoche président de fer était encore omniprésent. Piètre sosie d'un acteur de série B aux cheveux teints, posant, la main sur le cœur à chaque coin de rue, dans chaque lieu public, à côté des pubs pour les biscuits "Tigato" et pour les firmes corrompues se partageant le gâteau.

     Et voilà. Maintenant nous sommes au début 2011. Dans l'odeur du jasmin et de la poudre, dans le bruit des youyous et des balles, la Tunisie a fait sa "Révolution Facebook". Bonheur de découvrir ces incroyables images à la télévision qui en rappellent d'autres. À Berlin non plus, nous n'avions rien vu venir en novembre 1989. Pas plus qu'à Bucarest le mois suivant. Pas plus qu'au Caire ces dernières semaines...

     Nous parlons de tout cela, ce soir, dans cette ferme de Bresse où, depuis plus de trois ans, mon père veille seul avec son chien et ses cartes postales. Celle-ci, un peu plus ancienne, a été postée de Louxor: "Le printemps égyptien est doux. De part et d'autre du Nil, des merveilles nous attendent. À bientôt. On t'embrasse". Tout à l'heure, il nous rappellera comment lui aussi a retrouvé un jour la liberté. C'était en janvier 1945. L'armée russe avançait. Les portes du stalag de Silésie où il venait de passer plus de cinq ans s'ouvraient. Il allait encore mettre plus de quatre mois pour traverser, à pied et la faim au ventre, un no man's land de charniers, de ruines et de spectres hagards.

     Mais ceci est une autre histoire, direz-vous. Bien sûr. N'empêche, la Liberté, d'où qu'elle vienne, d'où qu'elle revienne, est la même. Au Nord ou à l'Est hier. Au Sud aujourd'hui. Dans nos sursauts collectifs. Dans nos émois partagés. Par l'étroite fenêtre aussi, parfois, de nos petites perceptions occidentales. D.P.

(Cette chronique a été publiée

dans l'hebdomadaire "Voix de l'Ain",

n° 3433, semaine du 11 au 18 février 2011). 

  

La carte de la gloire,

le territoire de l'oubli

   Le triomphe de Michel Houellebecq nous réjouit. Nous fûmes suffisamment déçus par ses échecs au Goncourt en 1998, avec Les Particules élémentaires, et en 2005, avec La Possibilité d'une île, pour ne pas nous féliciter de sa victoire, lundi dernier, à la troisième "tentative". Et cela d'autant plus que La Carte et le territoire (Flammarion) est un roman, à la fois désenchanté et jubilatoire, qui s'inscrit à merveille dans l'air du temps de ce mois de novembre 2010 où, sous la résignation apparente, se profile une très énergique "extension du domaine de la lutte".
   Le lendemain du prix, nous écoutions l'"heureux"  lauréat, sur France Inter, exhorter les auditeurs à ne jamais baisser les bras. "Ne vous laissez pas emmerder, soyez libres!", clamait-il. Magnifique, Michel! comme dirait Drucker qui ne va sans doute pas tarder à programmer un"Vivement dimanche"  houellebecquien. Il faut dire que ce matin-là, le malicieux écrivain à la paupière lasse comme ses anoraks réussissait une sacrée performance. Il volait carrément la vedette au général de Gaulle dont on célébrait pourtant, un peu partout ailleurs, le quarantième anniversaire de la disparition. Et lorsque l'invité déclara un brin péremptoire: "On n'a pas de devoirs envers son pays, on est des individus, c'est tout!", on a bien cru entendre, en bruit de fond radiophonique, le héros de Colombey se retourner dans sa tombe, pour autant que sa gigantesque stature posthume le lui en laissait le loisir.
   Tant pis pour "l'homme du 18 juin", c'est celui du 8 novembre qui était ici à l'honneur! La gloire est ainsi faite. L'enthousiasme du moment peut balayer d'un insolent revers de manche de parka fripée la majestuosité d'un uniforme. Voilà bien à quoi nous songions en écoutant ce drôle de fan de Jean-Pierre Pernaud et de Julien Lepers nous rappeler que "la France est un hôtel, pas plus".
   Injustice? Affaire de circonstances, c'est tout, évitons les grands mots. D'ailleurs, s'il y en a un qui est déjà rompu aux fatals soubresauts de la renommée, c'est à l'évidence Michel Houellebecq lui-même. "C'est curieux comme les choses changent..." fait-il dire au père de son double, à la page 217 de son opus désormais ceint de la prestigieuse bande rouge. Oui, les choses changent vite et bien malin qui pourrait évaluer la durée du rayonnement de celui qui, il n'y a pas si longtemps encore, était conspué à l'unanimité, ou presque.
   Comment pouvait-on, dans un contexte analogue, ne pas penser, au moment de l'attribution du prix, à un lauréat précédent qui vient de disparaître dans une assez scandaleuse indifférence? Lorsqu'il fut sacré, en 1968, pour Les Fruits de l'hiver, lui aussi capta tous les regards. Lui aussi éclipsa momentanément de Gaulle, avant que la chienlit ne déferle. Lui aussi fit des déclarations brutes de décoffrage. Lui aussi pesta contre les travers de la société du moment. Lui aussi réhabilita l'âme des provinces et des bourgades. Lui aussi fut traité de populiste. Lui aussi aimait les chiens. Lui aussi lorgnait vers l'Irlande. Lui? Il s'appelait Bernard Clavel et il a signé plus de quatre-vingts ouvrages dévorés, loin des chapelles, sinon celles du Jura aux toits de pierre et de bois, par des millions de gens.
  Comprenons-nous bien: il ne s'agit pas de comparer les mérites respectifs du "dépressif" du Gâtinais et du bûcheron franc-comtois. Leurs oeuvres, pas plus que leurs démarches, leurs postures et leurs convictions - quoi que... - n'offrent de vraies similitudes. Qu'on nous permette simplement d'y mieux mesurer, parfois jusqu'au vertige, l'indécent grand écart auquel sont soumises, au fil des ans, ces notions floues que sont, en art, le goût et la reconnaissance, l'emballement et la postérité, le lâchage et la fidélité.
   Allez, terminons par une hypothèse. Et si, un de ces quatre, Michel Houellebecq rédigeait un vibrant éloge de Bernard Clavel? Dans La Carte et le territoire, il rend bien un hommage aussi inattendu sous sa plume que mérité pour l'intéressé, à un autre laissé-pour-compte de l'ingrat monde des Lettres: Jean-Louis Curtis (1917-1995). Curtis avait lui aussi obtenu le Goncourt. C'était en 1947 pour Les Forêts de la nuit. Ces forêts où il rôde aujourd'hui, si loin des splendeurs de chez Drouant, avec Clavel et tant d'autres, avant que l'histoire littéraire ne rende son jugement dernier. Au minimum dans un siècle ou deux, "particules élémentaires" comprises. D.P.
(Cette chronique a été publiée,

dans une version légèrement modifiée,

dans l'hebdomadaire "Voix du Jura",

n° 3452, semaine du 20 au 26 janvier 2011). 

 

Ferrat, Chabrol:

l'émotion consolatrice
   Drôles d'hommages, quand on y pense. Il y a quelques mois, la France, larme printanière à l'oeil et lyrisme aragonien aux lèvres, n'en finissait plus de saluer Jean Ferrat. La télévision nationale, on s'en souvient, n'hésita pas à retransmettre en direct les obsèques de l'"échappé"  ardéchois, un peu à la façon d'une étape de la "Grande boucle" dans un col cévenol. Et les foules bigarrées ne cessent, depuis, de se bousculer dans l'étroit cimetière basaltique, lors d'un fervent ballet qui ne manquerait pas d'agacer le discret compagnon des petites routes et des pensées rebelles.
   C'était en mars dernier, entre les deux tours d'une élection que les "bonnes gens"  boudèrent en une obstination inversement proportionnelle à celle qu'ils insufflèrent dans leur "au revoir" au chantre de La Montagne. Et voici donc qu'un semestre plus tard disparaît Claude Chabrol, sous un concert de louanges et face une émotion, certes pas tout à fait de la dimension de la précédente, mais néanmoins étonnante par son impact à la fois médiatique et intimiste.
   Holà, que se passe-t-il donc pour qu'un pays peu réputé pour aimer ses artistes - c'est un euphémisme - manifeste ainsi, coup sur coup, sa sympathie et son chagrin? Un tel engouement se justifie évidemment, au-delà de la force des couplets ou des films des deux créateurs, par la somme d'admiration et de proximité qu'ils inspiraient, chacun de son côté. Le premier par son insolente tendresse et ses engagements jamais feints. Le second par son observation espiègle et grinçante de la société. Mais sans doute faut-il voir également, dans ces effets conjugués de complicité populaire, des éléments d'ordre plus circonstantiels. L'interprète de Ma Môme et le cinéaste du Boucher, dans des registres répétons-le fort différents, n'en incarnaient pas moins l'un et l'autre, y compris sans doute jusque dans les propres limites de certaines de leurs oeuvres, une honnêteté, un goût du travail bien fait, un attachement à la mémoire et un indéfectible respect des individus. Autant de valeurs, faut-il le rappeler, qui font particulièrement défaut en une époque de cynisme roi, de politique dévoyée, de chasse aux minorités ethniques, de charters vrombissant d'indécence sur le tarmac glissant des campagnes électorales...
   Impossible de réécouter une chanson de Ferrat ou de se "repasser" un film de Chabrol sans s'imprégner des bénéfiques célébrations de la patience, de la malice, de la tolérance et de la liberté. Et puis, avons-le, nous ressentions une vraie consolation à les voir l'un et l'autre, moustache frémissante ou pipe en bouche, parler soupes d'autrefois, vins de terroir et pourfendre en se marrant "les cons qui n'arrêtent pas de voler et les autres de les regarder", cela en une époque où la fumée conviviale, le verre entre amis et l'humour décapant tombent sous le coup de la loi, alors que la "bêtise d'Etat" entache le pays du droit de Roms. 
   Entre "ombre faite humaine" et "oeil de Vichy", entre "amour cerise"  et adultères provinciales, Jean Ferrat et Claude Chabrol étaient tous deux, à leur manière, d'Antraigues à Sardent, d'éloquents refrains en travellings suggestifs, inscrits à l'inventaire de nos monuments historiques familiers. Continuons à nous précipiter pour la visite en groupes de leurs battements de coeur, de leurs ricanements, de leurs univers, de leur exemplarité. Alléluia et Moteur! D.P.

   

 La rentrée littéraire,

quelle vacherie!
 Elle est retrouvée. Quoi? La rentrée littéraire qui n'a, avouons-le, pas grand'chose à voir avec l'éternité rimbaldienne. Les libraires transpirent. Les attachées de presse s'enfièvrent. Les chroniqueurs frottent leurs lunettes et affûtent leur sens critique. Un peu partout on compte, on compare, on spécule. Au juste, 701 romans, dont 497 français, ça fait combien de plus, de moins ou de pile poil pareil que l'année dernière qui, elle-même, etc. Drôle de phénomène bien de chez nous que cette espèce de foire d'automne où l'on remplace les bestiaux par des bouquins et les viriles clameurs des enchères par des maquignonnages autour des prix. Palpez un peu cette Nothomb, vous m'en direz des nouvelles. Et le dernier fleuron de la race Houellebecq, visez-moi cette encolure. 
   S'il y en a une qui ne risque pas de s'offusquer de la métaphore bovine, c'est bien Claudie Gallay. La petite femme aux yeux bleu pervenche, propulsée directement de ses terreuses origines nord-iséroises aux "déferlantes" du succès, a écrit son nouvel opus, L'Amour est une île, (Actes Sud), dans sa bergerie du Charolais. Avec des broutards crème meuglant sous sa fenêtre. Avec un ciel pluvieux comme vache qui pisse. La-bas, du côté de La Clayette et de Semur, il y a les prés sans Saint-Germain. Et les éleveurs, qui tordent leurs casquettes à l'heure d'écorner leurs troupeaux, se fichent de l'embouche romanesque comme de la première litière de leur stabulation.
   Ils ne dévoreront ni Despentes, ni Forest, ni Volodine. Ni Linda Lê, ni Adam, ni Claudel. Et encore moins Breat Easton Ellis et J.M. Cootzee. Pas le temps. Propos un brin savants. Bref, un monde qui n'est pas le leur. Claudie, ce n'est pas pareil. Elle est presque d'ici. Elle cause comme l'ultime épicière du coin qui fait dépôt de pain et de journaux. Pas mince, le compliment.
    Cette fois-ci, c'est vrai, elle s'est embarquée du côté du festival d'Avignon l'année de la grève des intermittents. Evidemment, on s'en fiche un peu sur les rives de la Grosne, de la Guye ou du Grison. Mais sûr, la prochaine fois, elle parlera des gens du cru. A commencer, peut-être, par les habitants de Saint-Ythaire. Saint-Ythaire, c'est entre Bonnay et Curtil-sous-Burnand. 122 âmes en colère contre le projet d'implantation de cinq éoliennes. Un super sujet pour l'écrivain qu'on a même aperçue l'autre soir au "Vingt heures" de TF1.
    Les révoltés de Saint-Ythaire? A moins que ce ne soient les Don Quichotte de Bény. Bény, c'est au coeur de la Bresse, de l'autre côté de la Saône. Là, c'est contre la future Ligne à grande vitesse qu'on se mobilise à coups de calicots et de banderoles accrochés aux barrières des fermes et des villas avec, parfois, des slogans en patois: "LGV, to ka t'nallo!" ("LGV, tu n'as qu'à t'en aller"!).
   Des hélices géantes bientôt essaimées dans le paysage si cher jadis aux abbés de Cluny ou des trains fous écrasant prochainement l'AOC des célèbres volailles aux pattes bleues. Fichue alternative, quand on y pense. D'autant plus que, dans ce décor de pseudo-polar rural, on ne discerne pas la moindre librairie à l'horizon. Alors, dites, où c'est qu'on va les trouver, à Saint-Ythaire, à Bény ou ailleurs, les 701 titres annoncés? Houellebecq a raison: il convient de revoir de toute urgence "La carte et le territoire". Ah! quelle vacherie, par ici, la rentrée littéraire. (Fin août 2010). D.P.

 

Quelques nouvelles de par ici
 
 
    Je vais vous donner un peu des nouvelles de par ici. C'est où par ici? C'est chez moi. Enfin, je veux dire pas loin. A la rigueur juste à côté. Le décor, vous le connaissez. Il y a un village avec son clocher vaguement roman. Le presbytère transformé en gîte rural. L'épicerie où l'on vend des caramels pour les gosses et des asticots pour la pêche. Le calme règne jusqu'au milieu de l'après-midi. C'est à ce moment-là que les tracteurs ramènent les voitures de foin dans les fermes. Les travaux agricoles, cette année, quelle galère: on est passé directement de l'hiver du mois de mai à la canicule du solstice! Vers dix-huit heures, dix-huit heure trente, les gosses font des pirouettes à bécane et les ados, sur la placette, gloussent dans leurs téléphones portables sans jamais déclarer forfait. Ensuite, le boulodrome de fortune prend  doucement des allures de petit G20 provincial.
    Imperturbable, l'employé municipal arrose les fleurs. Ou ce qu'il en reste. Le week-end dernier, des dadais en goguette ont piétiné les terre-pleins. "Saloperie de désoeuvrés!" maugrée Jean en lisant l'entrefilet dans la chronique locale. Jean, c'est le facteur. Après sa tournée, il aime bien prendre un verre. Le seul café qui n'a pas encore baissé rideau aligne trois tables sur le trottoir. Les autres troquets ont tous fermé. Trop de travaux pour se mettre aux normes. En sirotant son panaché, le préposé s'attarde sur le journal du coin. Les décès, les mariages, les naissances, les accidents... Il lit aussi le billet, en haut à gauche de la page 2. Il y a même la photo du chroniqueur qui tient un bouquin dans ses mains. En regardant de près, on découvre le titre et l'auteur. C'est Après beaucoup d'années de Philippe Jaccottet.
    Jaccottet est un immense poète qui vit dans les parages. Mais personne ne le connaît vraiment. Jean s'en fiche. Lui, ce qu'il recherche dans son canard, ce sont les infos pratiques. Ou les échos du conseil municipal. L'annonce des fêtes d'été. Les vide-greniers des alentours. Mais à la Une, il y a cette photo. Un ministre et sa femme "dans la tourmente". Eric et Florence Woerth, ils s'appellent. Pierrot, le patron du café, qui vient faire un brin de causette à Jean, prononce ce nom à sa façon. Il dit "Voerte" et ça sonne un peu comme un hommage aux absinthes verlainiennes d'autrefois. "Tous pareils, hein, y'en a pas un pour racheter l'autre!". Jean, le regard rivé aux résultats du "Mondial" de foot et au classement général du Tour de France, ne répond rien. Ou alors il fait "hum hum" et bien malin qui pourrait comprendre si c'est une approbation ou l'inverse. 
  Rien ne bouge, ou presque. Il y a juste un soupçon d'électricité dans l'air. La grêle est annoncée pour le soir mais, c'est bien connu, "à la météo, ils se trompent tout le temps...". N'empêche, il faut hâter la fenaison. Demain à l'aube, les fourches hydrauliques des colossaux Renault ou John Deere payés à crédit planteront leurs dents dans ces rouleaux herbeux qui, au mitan des parcelles de la PAC, ressemblent aux chignons lavande des aïeules de ce "pays". Ce "pays" qui pleure et qui rit, qui meurt et qui vit. Ce "pays" qui attend les touristes. Ce "pays" en jachère où, dans les villas des lotissements en extension, Internet remplace désormais l'épicier qui faisait jadis sa tournée en klaxonnant à travers des hameaux pleins de vieux taiseux et de chiens tout en gueule. 
  Voilà, ça se passe par ici un jour brûlant de juillet. Plus tard, peut-être, je vous donnerai des nouvelles de par là-bas. C'est où par là-bas? C'est du côté de par ici. Si jamais, un de ces quatre, vous avez l'occasion, arrêtez vous quelques instants, on parlera un peu de Jaccottet. "Faites passer, disait la terre elle-même, ce matin-là, de sa voix qui n'en est pas une. Mais quoi encore? Quelle consigne?" (Juillet 2010). D.P.
 

    

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