Et revoici la France de Mai. Encore quelques heures et on y sera. Patience. La France de mai, on la connaît bien. Avec son grelot aigrelet de muguet, son pollen en ordre dispersé, ses syndicats et ses bannières. La France de mai est bonne fille. Elle prend des airs d'été sans vraiment y croire elle-même. Elle fredonne du Montand et du Nougaro, elle relit Musset et Apollinaire, elle guette son reflet dans une toile de Bonnard. Entre soleil franc et mercure capricieux, elle se croit en terrasse rien qu'à s'approcher des fenêtres. La France de mai est vive et souple. De Jean Jaurès à Jeanne d'Arc, elle fait le grand écart. La France de mai est allergique. Elle mouche son nez dans le drapeau et gare ses larmes dans un mouchoir. La France de mai est coquette. Elle se pomponne de poudre et se fait des mèches de cocktails-Molotov. La France de mai est rebelle et bon enfant. Elle est de 68 et chausse du 36. La France de mai a un parfum d'élections même les années sans. La France de mai passe ses journées couchée dans l'herbe et ses nuits debout sur le bitume. Pour oublier son vague-à-l'âme, la France de mai se fumerait bien un p'tit juin. Allez, encore un moi et ce sera bon! D.P.