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8 janvier 2018 1 08 /01 /janvier /2018 21:30
Photos © Didier Pobel
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2 janvier 2018 2 02 /01 /janvier /2018 11:12
Et bonne année, bien sûr!

Et, aux dernières nouvelles, 2018 ne devrait durer que douze mois. Encore un coup de l'obsolescence programmée! #balanceta2017

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7 décembre 2017 4 07 /12 /décembre /2017 10:49
Avec Nelly Catherin. Photo © D.P.
Avec Nelly Catherin. Photo © D.P.
Avec Nelly Catherin. Photo © D.P.

Avec Nelly Catherin. Photo © D.P.

C'était mardi dernier. Le 5 décembre à 18 heures. Une belle rencontre autour de mes livres, et notamment des deux récemment parus, Maman aime danser et Je volais je le jure (Bulles de savon, 2016 et 2017), initiée par Nelly Catherin, la conservatrice du superbe Musée Chintreuil de Pont-de-Vaux, dans l'Ain. Plaisir d'échanger ainsi dans ce lieu voué à l'art et aux "curiosités" (un précieux cabinet leur est dédié). En espérant, pour l'occasion, n'en avoir pas été un simple objet... D.P.

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7 novembre 2017 2 07 /11 /novembre /2017 11:11
"Aller aux champignons"
"Aller aux champignons"

"Aller aux champignons"? Tout un programme, assurément. Même une année où, comme celle-ci, la sécheresse joue les trouble-fête. Restent, malgré tout, de beaux moments que j'ai tentés de décrire dans cet article publié par l'hebdomadaire La Voix de l'Ain de cette semaine (n° 3784, du 3 au 9 novembre, p. 10). Et cela, bien sûr, non sans un clin d'œil à mon cher André Dhôtel.

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31 octobre 2017 2 31 /10 /octobre /2017 23:06
En passant devant un petit cimetière du Revermont... Photo © Didier Pobel

En passant devant un petit cimetière du Revermont... Photo © Didier Pobel

   Qu'est-ce qu'on peut faire un 1er novembre? Oh! pas grand-chose. Ranger les oripeaux sanglants d'Halloween, guetter à la télé les premiers zéros sur la carte des températures, faire la fête à tous les saints. Et puis, bien sûr, aller au cimetière. Bonjour les morts, ne vous dérangez pas, on ne fait que passer!

  Sinon, on peut aussi naître un 1er novembre. Certes, n'est pas à première vue le jour le plus faste mais ceux qui sont venus au monde à cette date ne s'en portent pas forcément mal. C'est par exemple le cas d'Adamo, enfant de la Toussaint 1943. Avouez qu'il y a plus triste comme chanteur. D'ailleurs Brel ne l'avait-il pas surnommé "le tendre jardinier de l'amour"?  Il y a aussi, en 1951, Fabrice Luchini. "Naître à la Toussaint, c'est hééénaurme!". On croit l'entendre commenter l'événement. S'il y en a un qui ne semble pas particulièrement hanté par le trépas, c'est bien lui.

   Pas moins que ne le fut le grand poète Jean Tardieu, apparu sur Terre au premier jour de novembre 1903. Il aura, en tout cas, été l'un de ceux qui ont le mieux su insuffler la fantaisie à leur œuvre, y compris en singeant la Faucheuse qui le rattrapa en 1995. "Je suis, tu es, je suis tu-é" s'amusait ainsi l'auteur de La Môme Néant.  

   Et à part ça, qu'est-ce qu'on peut faire encore, dites, un 1er novembre? Eh! bien, on peut mourir. Si, si. Évidemment, ça ressemble à un pléonasme mais certains n'ont pas eu de scrupule. On citera ici Alfred Jarry qui, en 1907, passa "à la trappe" promise à son héros Ubu. Ou bien Francis Jammes qui s'en alla trente et un ans plus tard en nous laissant des poèmes qu'on dirait écrits pour...

   Pour quoi? Mais pour un jour de Toussaint, pardi. Voici quatre vers particulièrement de circonstance :"Au pays basque on sonne encore l'agonie. / Et je songe à ma mort, au jour où j'entendrai / confusément, comme bourdonne une forêt, / Ces grands coups espacés d'une aile vers la vie".

   D.P.

 

 

 

 

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14 octobre 2017 6 14 /10 /octobre /2017 21:35
On lit je journal sur la plage à Collioure. Photo © D.P.

On lit je journal sur la plage à Collioure. Photo © D.P.

   Et en même temps il fait beau. Très beau même. Il y a de la légèreté dans l'air, de la douceur aux fronts, du froufrou dans les jupes . Pour un peu, c'est comme si tous les journaux télévisés singeaient celui de la Une.  On prend le Pernod  en terrasse, on lit le journal sur la plage à Collioure, on se baigne à Biarritz, on fait du vélo dans la Dombes. D'autant plus que, si d'habitude ça se gâte le week-end, là non. Le dimanche s'annonce même plus chaud que le samedi. Aux bulletins météo, on entend des phrases bizarres. Celle-ci, par exemple : "Le mercure va encore gagner du terrain".  C'est mieux que les particules fines. Sauf que nous voilà tout déboussolés.

   On est à la mi-octobre? Oh! la bonne blague. Ce serait plutôt le 14-Juillet. Emmanuel Macron, lui, n'en doute pas un instant. La preuve : il va se prêter ce soir sur TF1 et LCI à l'interview qu'il n'a pas donnée le jour de la Fête nationale. Il paraît que pour lancer l'émission, on verra l'Élysée d'en haut filmé par un drone. Chouettes images en perspective. Et symboliques, ma foi. Quand on est président, il faut en effet savoir prendre de la hauteur. Feindre aussi la modestie. Et parler ein Bisschen allemand. Sûr qu'Angela Merkel appréciera. Après "Ich bin nicht arrogant", comment dit-on "Et en même temps il fait beau" dans la langue de Goethe?  D.P.

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22 septembre 2017 5 22 /09 /septembre /2017 20:32
Photos © D.P.
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Dans une heure pile (j'écris ces mots à 21h01), nous serons en automne. Eh oui, cette année, l'été pend fin ce vendredi 22 septembre à 20h01 en TU (Temps universel), ce qui équivaut pour nous à 120 minutes de plus. L'explication scientifique de ce phénomène est à chercher du côté des caprices de l'axe de rotation de notre bonne vieille Terre. Trop savant tout cela pour qu'on fasse semblant d'être expert. Reste les photos qui, elles, ne se la jouent jamais. En voici quelques unes, saisies dans la campagne bressane ces derniers jours. Bel automne à tous! Avec, si vous le voulez bien, deux vers de Baudelaire : " C’était hier l’été ; voici l’automne ! / Ce bruit mystérieux sonne comme un départ". D.P.

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26 août 2017 6 26 /08 /août /2017 23:37
Photo D.P.

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   Même en comptant précautionneusement sur ses doigts bronzés, il n'y a pas de doute, nous sommes aujourd'hui le dernier dimanche d'août. Oh! ce n'est pas la fin de l'été, loin s'en faut, mais ce jour-là a toujours un drôle d'air. S'il fait encore très chaud, on évite de parler de canicule. Le vocable appartient au lexique des vacances. C'est un mot de juillet qu'on veut bien encore prononcer jusqu'au milieu du mois suivant, mais au-delà, le ridicule guette. Disons qu'il fait beau. Encore  beau serait plus juste.

  Et à cette date particulière, dites, qu'est-ce qu'on fait? Oh! presque rien. On traîne un peu à la campagne, à la plage, au camping. On repousse, on procrastine, on fait semblant de. Au dernier vide-grenier de la saison, on craque pour des objets qu'on oubliera aussitôt. Un abat-jour, un vieux fauteuil, un journal jauni.  Attention aussi à bien contourner les mots qui fâchent : "retour", "boulot", "reprise"... On commande un mojito en terrasse, on suce une glace à l'eau comme dans la chanson de Jonasz, on chasse de la main cette saloperie de pyrale du buis qui tournoie.

   Chez le pâtissier, on demande des macarons. On prononce lentement. C'est presque le nom du Président. Qu'il nous laisse tranquille. On aura bien le temps d'y revenir. À la radio et à la télé pourtant, il est déjà question des politiques qui font leur rentrée. On les oublierait bien encore un peu, ceux-là. À Touquet, on préfère bouquet. On veut ignorer de quoi demain sera fait. On flâne sur la rive étroite du temps, on se serre au creux des jours qui raccourcissent en douce, on charge la valise dans l'auto.

   À la maison, des livres nous attendent. La rentrée littéraire devance toujours l'autre. Parmi eux, le nouveau volume du "Journal" de Charles Juliet, Gratitude (1). En 2007, il y notait ceci : "Cinquante-sept ans aujourd'hui que Pavese s'est suicidé. Chaque année, à cette date, je pense à lui et au Métier de vivre". C'était un 26 août. On ne sait pas si c'était un dimanche. Un dimanche du mois d'août. D.P.

_______

 

(1) Gratitude, Journal IX 2004-2008, P.O.L.

 

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19 août 2017 6 19 /08 /août /2017 10:55
Photos Bernard Revel et D.P.
Photos Bernard Revel et D.P.
Photos Bernard Revel et D.P.

Photos Bernard Revel et D.P.

Août, le temps suspendu des visites. Avec Charles (Juliet) et ML, hier en Bresse, juste avant la pluie. L'occasion pour eux, pour nous, de retrouver également Suzanne et Bernard et de se remémorer le bel automne 2010 des Vendanges littéraires de Rivesaltes. En attendant la toute prochaine publication du neuvième tome du Journal de Charles, Gratitude (POL)...

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24 juillet 2017 1 24 /07 /juillet /2017 11:13
Photos © D.P.
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Trois artistes pour un été. C'est à la MAC (Maison des arts contemporains) de Pérouges, la cité médiévale de la Dombes, dans l'Ain. Trois artistes à l'affiche, trois univers croisés. Le lyrisme halluciné de Gilles Foras. L'imaginaire fantasque et coloré d'Aude Descombes. Et l'infini questionnement du monde à travers les matières et les reliefs d'un Dominique Husson oscillant sans cesse entre gravité et fantaisie. L'exposition s'intitule "Incubes, choses et tarasques" et elle s'achèvera le 27 août (MAC rue du For 01800 Pérouges 04 74 46 04 92). D.P.

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Présentation

  • : Le blog de Didier Pobel
  • : L'usage des jours (livres, poésie, voyages, journal, impressions...)
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Texte Libre

Ces révolutions que

nous n'avons pas vu venir

   De retour à Bény, en ce bel hiver de givre, je relis cette carte postale que mon père garde, avec celles des étés précédents, sur le buffet de la cuisine. "Sous le ciel encore chaud de la Tunisie, nous pensons bien à toi. Ici, on ne se croirait pas à la veille de la Toussaint. À bientôt. On t'embrasse". Des mots tout simples, écrits comme toujours à la hâte, au moment de reprendre l'avion. 

   C'était à peine trois mois plus tôt. Du Cap Bon où nous faisions halte, nous avions effectué de cahotants trajets à travers le pays. Le Temple des eaux au pied du djebel Zaghouan. Le site romain de Dougga, pur poème de pierre, de vent et d'oliviers, où Abdallah, notre guide, nous avait imposé une visite pour le moins exhaustive. Les villages poussiéreux où la population s'ennuie sous les palmiers flétris. Les charrettes, les bourricots, les antiques mobylettes. La pauvreté, la dignité et, pensions-nous, la résignation.

     La résignation? Eh oui, même lorsqu'on est le témoin d'un régime sans ambiguïtés, il n'est pas toujours si simple de pressentir l'histoire en marche. Avec le recul, pourtant, il y avait eu des scènes éloquentes. Ces barrages de police un peu partout, justifiés alors par un enlèvement d'enfant. Ce jeune diplômé quêtant quelques dinars dans les majestueuses ruines de Thuburbo Majus et qui se cachait pour aborder les "nantis" que nous étions à ses yeux. Un feu couvait en lui, c'est sûr. Il n'aurait peut-être pas fallu grand-chose pour qu'il parle. Mais nous étions pressés, comme souvent.

     Et, disons-le aussi, la méfiance nous gagnait. Un soir, du côté de la cité viticole de Grombalia, un 4X4 aux vitres fumées avait rattrapé notre "Symbol" de location. Une impression se confirmait: nous étions suivis. Sans doute vaut-il mieux ne pas écrire "journaliste" à la rubrique "profession" sur les fiches de douanes à l'arrivée lorsque, quelques mois plus tôt, on a utilisé le mot "dictature" pour rendre compte de la dernière parodie de réélection présidentielle au palais de Carthage.

     Les touristes européens flânaient dans les souks. Les cornes de gazelles étaient sucrées, le vin gris de Mornag montait à la tête, octobre avait de superbes rousseurs de désert et la tiédeur des plages invitait à fermer à demi les yeux. Que voulez-vous, c'est comme ça: exportées sur place, les plus solides notions de droits de l'homme se dissolvent parfois dans le bleu de la mer...

     Pour notre part, nous aurions dû prêter davantage attention aux ardents regards noirs de toute une jeunesse rivés aux téléphones portables. La "génération Ben Ali dégage!" préparait, dans la retenue, le grand soir arabe. Le fantoche président de fer était encore omniprésent. Piètre sosie d'un acteur de série B aux cheveux teints, posant, la main sur le cœur à chaque coin de rue, dans chaque lieu public, à côté des pubs pour les biscuits "Tigato" et pour les firmes corrompues se partageant le gâteau.

     Et voilà. Maintenant nous sommes au début 2011. Dans l'odeur du jasmin et de la poudre, dans le bruit des youyous et des balles, la Tunisie a fait sa "Révolution Facebook". Bonheur de découvrir ces incroyables images à la télévision qui en rappellent d'autres. À Berlin non plus, nous n'avions rien vu venir en novembre 1989. Pas plus qu'à Bucarest le mois suivant. Pas plus qu'au Caire ces dernières semaines...

     Nous parlons de tout cela, ce soir, dans cette ferme de Bresse où, depuis plus de trois ans, mon père veille seul avec son chien et ses cartes postales. Celle-ci, un peu plus ancienne, a été postée de Louxor: "Le printemps égyptien est doux. De part et d'autre du Nil, des merveilles nous attendent. À bientôt. On t'embrasse". Tout à l'heure, il nous rappellera comment lui aussi a retrouvé un jour la liberté. C'était en janvier 1945. L'armée russe avançait. Les portes du stalag de Silésie où il venait de passer plus de cinq ans s'ouvraient. Il allait encore mettre plus de quatre mois pour traverser, à pied et la faim au ventre, un no man's land de charniers, de ruines et de spectres hagards.

     Mais ceci est une autre histoire, direz-vous. Bien sûr. N'empêche, la Liberté, d'où qu'elle vienne, d'où qu'elle revienne, est la même. Au Nord ou à l'Est hier. Au Sud aujourd'hui. Dans nos sursauts collectifs. Dans nos émois partagés. Par l'étroite fenêtre aussi, parfois, de nos petites perceptions occidentales. D.P.

(Cette chronique a été publiée

dans l'hebdomadaire "Voix de l'Ain",

n° 3433, semaine du 11 au 18 février 2011). 

  

La carte de la gloire,

le territoire de l'oubli

   Le triomphe de Michel Houellebecq nous réjouit. Nous fûmes suffisamment déçus par ses échecs au Goncourt en 1998, avec Les Particules élémentaires, et en 2005, avec La Possibilité d'une île, pour ne pas nous féliciter de sa victoire, lundi dernier, à la troisième "tentative". Et cela d'autant plus que La Carte et le territoire (Flammarion) est un roman, à la fois désenchanté et jubilatoire, qui s'inscrit à merveille dans l'air du temps de ce mois de novembre 2010 où, sous la résignation apparente, se profile une très énergique "extension du domaine de la lutte".
   Le lendemain du prix, nous écoutions l'"heureux"  lauréat, sur France Inter, exhorter les auditeurs à ne jamais baisser les bras. "Ne vous laissez pas emmerder, soyez libres!", clamait-il. Magnifique, Michel! comme dirait Drucker qui ne va sans doute pas tarder à programmer un"Vivement dimanche"  houellebecquien. Il faut dire que ce matin-là, le malicieux écrivain à la paupière lasse comme ses anoraks réussissait une sacrée performance. Il volait carrément la vedette au général de Gaulle dont on célébrait pourtant, un peu partout ailleurs, le quarantième anniversaire de la disparition. Et lorsque l'invité déclara un brin péremptoire: "On n'a pas de devoirs envers son pays, on est des individus, c'est tout!", on a bien cru entendre, en bruit de fond radiophonique, le héros de Colombey se retourner dans sa tombe, pour autant que sa gigantesque stature posthume le lui en laissait le loisir.
   Tant pis pour "l'homme du 18 juin", c'est celui du 8 novembre qui était ici à l'honneur! La gloire est ainsi faite. L'enthousiasme du moment peut balayer d'un insolent revers de manche de parka fripée la majestuosité d'un uniforme. Voilà bien à quoi nous songions en écoutant ce drôle de fan de Jean-Pierre Pernaud et de Julien Lepers nous rappeler que "la France est un hôtel, pas plus".
   Injustice? Affaire de circonstances, c'est tout, évitons les grands mots. D'ailleurs, s'il y en a un qui est déjà rompu aux fatals soubresauts de la renommée, c'est à l'évidence Michel Houellebecq lui-même. "C'est curieux comme les choses changent..." fait-il dire au père de son double, à la page 217 de son opus désormais ceint de la prestigieuse bande rouge. Oui, les choses changent vite et bien malin qui pourrait évaluer la durée du rayonnement de celui qui, il n'y a pas si longtemps encore, était conspué à l'unanimité, ou presque.
   Comment pouvait-on, dans un contexte analogue, ne pas penser, au moment de l'attribution du prix, à un lauréat précédent qui vient de disparaître dans une assez scandaleuse indifférence? Lorsqu'il fut sacré, en 1968, pour Les Fruits de l'hiver, lui aussi capta tous les regards. Lui aussi éclipsa momentanément de Gaulle, avant que la chienlit ne déferle. Lui aussi fit des déclarations brutes de décoffrage. Lui aussi pesta contre les travers de la société du moment. Lui aussi réhabilita l'âme des provinces et des bourgades. Lui aussi fut traité de populiste. Lui aussi aimait les chiens. Lui aussi lorgnait vers l'Irlande. Lui? Il s'appelait Bernard Clavel et il a signé plus de quatre-vingts ouvrages dévorés, loin des chapelles, sinon celles du Jura aux toits de pierre et de bois, par des millions de gens.
  Comprenons-nous bien: il ne s'agit pas de comparer les mérites respectifs du "dépressif" du Gâtinais et du bûcheron franc-comtois. Leurs oeuvres, pas plus que leurs démarches, leurs postures et leurs convictions - quoi que... - n'offrent de vraies similitudes. Qu'on nous permette simplement d'y mieux mesurer, parfois jusqu'au vertige, l'indécent grand écart auquel sont soumises, au fil des ans, ces notions floues que sont, en art, le goût et la reconnaissance, l'emballement et la postérité, le lâchage et la fidélité.
   Allez, terminons par une hypothèse. Et si, un de ces quatre, Michel Houellebecq rédigeait un vibrant éloge de Bernard Clavel? Dans La Carte et le territoire, il rend bien un hommage aussi inattendu sous sa plume que mérité pour l'intéressé, à un autre laissé-pour-compte de l'ingrat monde des Lettres: Jean-Louis Curtis (1917-1995). Curtis avait lui aussi obtenu le Goncourt. C'était en 1947 pour Les Forêts de la nuit. Ces forêts où il rôde aujourd'hui, si loin des splendeurs de chez Drouant, avec Clavel et tant d'autres, avant que l'histoire littéraire ne rende son jugement dernier. Au minimum dans un siècle ou deux, "particules élémentaires" comprises. D.P.
(Cette chronique a été publiée,

dans une version légèrement modifiée,

dans l'hebdomadaire "Voix du Jura",

n° 3452, semaine du 20 au 26 janvier 2011). 

 

Ferrat, Chabrol:

l'émotion consolatrice
   Drôles d'hommages, quand on y pense. Il y a quelques mois, la France, larme printanière à l'oeil et lyrisme aragonien aux lèvres, n'en finissait plus de saluer Jean Ferrat. La télévision nationale, on s'en souvient, n'hésita pas à retransmettre en direct les obsèques de l'"échappé"  ardéchois, un peu à la façon d'une étape de la "Grande boucle" dans un col cévenol. Et les foules bigarrées ne cessent, depuis, de se bousculer dans l'étroit cimetière basaltique, lors d'un fervent ballet qui ne manquerait pas d'agacer le discret compagnon des petites routes et des pensées rebelles.
   C'était en mars dernier, entre les deux tours d'une élection que les "bonnes gens"  boudèrent en une obstination inversement proportionnelle à celle qu'ils insufflèrent dans leur "au revoir" au chantre de La Montagne. Et voici donc qu'un semestre plus tard disparaît Claude Chabrol, sous un concert de louanges et face une émotion, certes pas tout à fait de la dimension de la précédente, mais néanmoins étonnante par son impact à la fois médiatique et intimiste.
   Holà, que se passe-t-il donc pour qu'un pays peu réputé pour aimer ses artistes - c'est un euphémisme - manifeste ainsi, coup sur coup, sa sympathie et son chagrin? Un tel engouement se justifie évidemment, au-delà de la force des couplets ou des films des deux créateurs, par la somme d'admiration et de proximité qu'ils inspiraient, chacun de son côté. Le premier par son insolente tendresse et ses engagements jamais feints. Le second par son observation espiègle et grinçante de la société. Mais sans doute faut-il voir également, dans ces effets conjugués de complicité populaire, des éléments d'ordre plus circonstantiels. L'interprète de Ma Môme et le cinéaste du Boucher, dans des registres répétons-le fort différents, n'en incarnaient pas moins l'un et l'autre, y compris sans doute jusque dans les propres limites de certaines de leurs oeuvres, une honnêteté, un goût du travail bien fait, un attachement à la mémoire et un indéfectible respect des individus. Autant de valeurs, faut-il le rappeler, qui font particulièrement défaut en une époque de cynisme roi, de politique dévoyée, de chasse aux minorités ethniques, de charters vrombissant d'indécence sur le tarmac glissant des campagnes électorales...
   Impossible de réécouter une chanson de Ferrat ou de se "repasser" un film de Chabrol sans s'imprégner des bénéfiques célébrations de la patience, de la malice, de la tolérance et de la liberté. Et puis, avons-le, nous ressentions une vraie consolation à les voir l'un et l'autre, moustache frémissante ou pipe en bouche, parler soupes d'autrefois, vins de terroir et pourfendre en se marrant "les cons qui n'arrêtent pas de voler et les autres de les regarder", cela en une époque où la fumée conviviale, le verre entre amis et l'humour décapant tombent sous le coup de la loi, alors que la "bêtise d'Etat" entache le pays du droit de Roms. 
   Entre "ombre faite humaine" et "oeil de Vichy", entre "amour cerise"  et adultères provinciales, Jean Ferrat et Claude Chabrol étaient tous deux, à leur manière, d'Antraigues à Sardent, d'éloquents refrains en travellings suggestifs, inscrits à l'inventaire de nos monuments historiques familiers. Continuons à nous précipiter pour la visite en groupes de leurs battements de coeur, de leurs ricanements, de leurs univers, de leur exemplarité. Alléluia et Moteur! D.P.

   

 La rentrée littéraire,

quelle vacherie!
 Elle est retrouvée. Quoi? La rentrée littéraire qui n'a, avouons-le, pas grand'chose à voir avec l'éternité rimbaldienne. Les libraires transpirent. Les attachées de presse s'enfièvrent. Les chroniqueurs frottent leurs lunettes et affûtent leur sens critique. Un peu partout on compte, on compare, on spécule. Au juste, 701 romans, dont 497 français, ça fait combien de plus, de moins ou de pile poil pareil que l'année dernière qui, elle-même, etc. Drôle de phénomène bien de chez nous que cette espèce de foire d'automne où l'on remplace les bestiaux par des bouquins et les viriles clameurs des enchères par des maquignonnages autour des prix. Palpez un peu cette Nothomb, vous m'en direz des nouvelles. Et le dernier fleuron de la race Houellebecq, visez-moi cette encolure. 
   S'il y en a une qui ne risque pas de s'offusquer de la métaphore bovine, c'est bien Claudie Gallay. La petite femme aux yeux bleu pervenche, propulsée directement de ses terreuses origines nord-iséroises aux "déferlantes" du succès, a écrit son nouvel opus, L'Amour est une île, (Actes Sud), dans sa bergerie du Charolais. Avec des broutards crème meuglant sous sa fenêtre. Avec un ciel pluvieux comme vache qui pisse. La-bas, du côté de La Clayette et de Semur, il y a les prés sans Saint-Germain. Et les éleveurs, qui tordent leurs casquettes à l'heure d'écorner leurs troupeaux, se fichent de l'embouche romanesque comme de la première litière de leur stabulation.
   Ils ne dévoreront ni Despentes, ni Forest, ni Volodine. Ni Linda Lê, ni Adam, ni Claudel. Et encore moins Breat Easton Ellis et J.M. Cootzee. Pas le temps. Propos un brin savants. Bref, un monde qui n'est pas le leur. Claudie, ce n'est pas pareil. Elle est presque d'ici. Elle cause comme l'ultime épicière du coin qui fait dépôt de pain et de journaux. Pas mince, le compliment.
    Cette fois-ci, c'est vrai, elle s'est embarquée du côté du festival d'Avignon l'année de la grève des intermittents. Evidemment, on s'en fiche un peu sur les rives de la Grosne, de la Guye ou du Grison. Mais sûr, la prochaine fois, elle parlera des gens du cru. A commencer, peut-être, par les habitants de Saint-Ythaire. Saint-Ythaire, c'est entre Bonnay et Curtil-sous-Burnand. 122 âmes en colère contre le projet d'implantation de cinq éoliennes. Un super sujet pour l'écrivain qu'on a même aperçue l'autre soir au "Vingt heures" de TF1.
    Les révoltés de Saint-Ythaire? A moins que ce ne soient les Don Quichotte de Bény. Bény, c'est au coeur de la Bresse, de l'autre côté de la Saône. Là, c'est contre la future Ligne à grande vitesse qu'on se mobilise à coups de calicots et de banderoles accrochés aux barrières des fermes et des villas avec, parfois, des slogans en patois: "LGV, to ka t'nallo!" ("LGV, tu n'as qu'à t'en aller"!).
   Des hélices géantes bientôt essaimées dans le paysage si cher jadis aux abbés de Cluny ou des trains fous écrasant prochainement l'AOC des célèbres volailles aux pattes bleues. Fichue alternative, quand on y pense. D'autant plus que, dans ce décor de pseudo-polar rural, on ne discerne pas la moindre librairie à l'horizon. Alors, dites, où c'est qu'on va les trouver, à Saint-Ythaire, à Bény ou ailleurs, les 701 titres annoncés? Houellebecq a raison: il convient de revoir de toute urgence "La carte et le territoire". Ah! quelle vacherie, par ici, la rentrée littéraire. (Fin août 2010). D.P.

 

Quelques nouvelles de par ici
 
 
    Je vais vous donner un peu des nouvelles de par ici. C'est où par ici? C'est chez moi. Enfin, je veux dire pas loin. A la rigueur juste à côté. Le décor, vous le connaissez. Il y a un village avec son clocher vaguement roman. Le presbytère transformé en gîte rural. L'épicerie où l'on vend des caramels pour les gosses et des asticots pour la pêche. Le calme règne jusqu'au milieu de l'après-midi. C'est à ce moment-là que les tracteurs ramènent les voitures de foin dans les fermes. Les travaux agricoles, cette année, quelle galère: on est passé directement de l'hiver du mois de mai à la canicule du solstice! Vers dix-huit heures, dix-huit heure trente, les gosses font des pirouettes à bécane et les ados, sur la placette, gloussent dans leurs téléphones portables sans jamais déclarer forfait. Ensuite, le boulodrome de fortune prend  doucement des allures de petit G20 provincial.
    Imperturbable, l'employé municipal arrose les fleurs. Ou ce qu'il en reste. Le week-end dernier, des dadais en goguette ont piétiné les terre-pleins. "Saloperie de désoeuvrés!" maugrée Jean en lisant l'entrefilet dans la chronique locale. Jean, c'est le facteur. Après sa tournée, il aime bien prendre un verre. Le seul café qui n'a pas encore baissé rideau aligne trois tables sur le trottoir. Les autres troquets ont tous fermé. Trop de travaux pour se mettre aux normes. En sirotant son panaché, le préposé s'attarde sur le journal du coin. Les décès, les mariages, les naissances, les accidents... Il lit aussi le billet, en haut à gauche de la page 2. Il y a même la photo du chroniqueur qui tient un bouquin dans ses mains. En regardant de près, on découvre le titre et l'auteur. C'est Après beaucoup d'années de Philippe Jaccottet.
    Jaccottet est un immense poète qui vit dans les parages. Mais personne ne le connaît vraiment. Jean s'en fiche. Lui, ce qu'il recherche dans son canard, ce sont les infos pratiques. Ou les échos du conseil municipal. L'annonce des fêtes d'été. Les vide-greniers des alentours. Mais à la Une, il y a cette photo. Un ministre et sa femme "dans la tourmente". Eric et Florence Woerth, ils s'appellent. Pierrot, le patron du café, qui vient faire un brin de causette à Jean, prononce ce nom à sa façon. Il dit "Voerte" et ça sonne un peu comme un hommage aux absinthes verlainiennes d'autrefois. "Tous pareils, hein, y'en a pas un pour racheter l'autre!". Jean, le regard rivé aux résultats du "Mondial" de foot et au classement général du Tour de France, ne répond rien. Ou alors il fait "hum hum" et bien malin qui pourrait comprendre si c'est une approbation ou l'inverse. 
  Rien ne bouge, ou presque. Il y a juste un soupçon d'électricité dans l'air. La grêle est annoncée pour le soir mais, c'est bien connu, "à la météo, ils se trompent tout le temps...". N'empêche, il faut hâter la fenaison. Demain à l'aube, les fourches hydrauliques des colossaux Renault ou John Deere payés à crédit planteront leurs dents dans ces rouleaux herbeux qui, au mitan des parcelles de la PAC, ressemblent aux chignons lavande des aïeules de ce "pays". Ce "pays" qui pleure et qui rit, qui meurt et qui vit. Ce "pays" qui attend les touristes. Ce "pays" en jachère où, dans les villas des lotissements en extension, Internet remplace désormais l'épicier qui faisait jadis sa tournée en klaxonnant à travers des hameaux pleins de vieux taiseux et de chiens tout en gueule. 
  Voilà, ça se passe par ici un jour brûlant de juillet. Plus tard, peut-être, je vous donnerai des nouvelles de par là-bas. C'est où par là-bas? C'est du côté de par ici. Si jamais, un de ces quatre, vous avez l'occasion, arrêtez vous quelques instants, on parlera un peu de Jaccottet. "Faites passer, disait la terre elle-même, ce matin-là, de sa voix qui n'en est pas une. Mais quoi encore? Quelle consigne?" (Juillet 2010). D.P.
 

    

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