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17 juin 2013 1 17 /06 /juin /2013 00:42

   On a un peu honte à le dire parce qu'enfin, tout ça, c'est des sornettes, mais n'empêche que, par moments, ça nous prenait, on croyait Maurice Nadeau éternel. Parce qu'à 102 ans, on le savait encore à son bureau, à ouvrir les enveloppes de manuscrits qui parvenaient, coquilles de noix échouées dans l'océan de l'écriture, jusqu'à son antre d'éditeur-découvreur, on se disait que ça ne s'arrêterait pas, que ça ne pouvait pas s'arrêter. Que ce fou de mots qui dénicha un jour Gombrowicz, Pérec, Péju ou Houellebecq - pour ne citer que quelques-uns des talents qu'il repéra - était à jamais inscrit dans la quotidienneté de ce qui s'écrit et se publie.

   Eh bien, il faudra s'y faire, c'est faut. "Monsieur Maurice" est parti ce dimanche de canicule, sur la pointe des pieds, sans faire de bruit dans une actualité et dans un monde qui se fichent pas mal de la littérature. Mais jusqu'au bout le vieux combattant se sera dépensé sans compter pour donner vie aux livres auxquels il croyait, parfois seul contre tous jusqu'à ce que le temps lui donne raison. Son ultime combat fut pour "sa" revue, La Quinzaine littéraire, sans cesse sur le fil du rasoir d'une économie de marché qui ne sait lire que les graphiques.

   Après la mort prématurée de Jean-Marc Roberts, patron de Stock, il y a peu, la disparition de son prestigieux aîné est un nouveau choc pour un secteur en crise. Les deux hommes étaient, d'une certaine façon, à l'opposé l'un de l'autre. Roberts était un "voyou" des Lettres, Nadeau un dinosaure, mais ils se complétaient. Tchao "Monsieur Maurice"! Pas la peine de vous couvrir, il fait chaud. Nous, on va rester là, à l'ombre, pour lire un peu. Y'a pas plus bel hommage, non? D.P.   

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9 juin 2013 7 09 /06 /juin /2013 21:29

   

   Un long dimanche de prières. C'était hier à Pretoria. C'était hier à Johannesburg, sa ville. C'était hier un peu partout dans le pays. A l'heure où nous vivions, nous autres, au festif rythme binaire des balles de Roland-Garros, tout un peuple était là-bas suspendu à un autre "ploc-ploc". Celui du vieux coeur usé de Nelson Mandela. Un coeur qui aura tant battu pour l'égalité, tant battu pour la liberté, tant battu pour l'humanité. Et ce qui inquiète plus que tout en Afrique du Sud, c'est le silence qui prévaut sur la santé du "père du peuple". Pas le moindre communiqué depuis les premières déclarations évoquant laconiquement un "état préoccupant mais stable".

   Une chape de plomb quasiment soviétique qui frustre et exaspère évidemment tous ceux qui n'ont de pensées que pour leur héros anti-apartheid. Car ce qu'on redoute peut-être plus que tout, c'est un acharnement qui serait perçu comme une manière d'insulte à l'élan vital dont a témoigné toute sa vie l'icone pacifiste. A tel point que le Sunday Time s'est permis un titre de Une en forme d'audacieuse et fervente supplique: "It's time to let him go" ("Il est temps de le laisser partir"). Un inhabituel hommage "anthume", vers lequel ont convergé beaucoup d'échos analogues, et qui en dit long sur le statut hors norme de celui qui se sera donc ainsi retrouvé, un peu à la manière des dieux antiques, littéralement embaumé de son vivant. D.P.

 

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20 mai 2013 1 20 /05 /mai /2013 21:32

  Il s'appelait Laclos. Comme Pierre Choderlos (de). Mais ses lettres à lui ne relevaient pas de l'art épistolaire. C'étaient tout simplement celles de l'alphabet, ce qui n'excluait pas certaines liaisons dangereuses qui faisaient les délices de ses adeptes. Profession: verbicruciste. Voilà ce qu'aurait pu déclarer Michel Laclos qui vient de boucler sa dernière grille à l'âge de 86 ans. Que l'on soit accro à ce divertissement de fin de magazine, ou pratiquant occasionnel, on s'est tous, un jour ou l'autre, gratté le front, crayon en main, en attendant l'éclair de lucidité à même de faire jaillir la bonne définition.

   Erudit, malicieux, ludique, agaçant aussi quand il le faut, l'ami de Breton, de Chaval ou de Vialatte était d'abord un fou de mots, créateur, dès 1955, de la revue Bizarre qu'il dirigea, quelque quinze années durant, en y conviant ces autres toqués de langage que furent Queneau, Roussel, Siné, Topor ou Folon. Comme Max Favalleli, Robert Scipion ou Georges Pérec, Michel Laclos, des papous plein la tête, jonglait avec les consonnes et les voyelles pour mieux revisiter, jusqu'à l'absurde, nos vocables les plus courants. Sans exclure évidemment ces "Ur", "Ir" et "Io" ponctuant immanquablement ses grils sémantiques.
   Lui qui les réduisait au maximum, le voilà tout à coup case noire à lui tout seul. Michel Laclos, horizontalement, hélas. D.P.      
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9 mai 2013 4 09 /05 /mai /2013 20:47

    François Fillon est un vrai samouraï. Droit dans ses bottes et courbette de bon aloi, il a choisi le Japon pour annoncer qu'il serait candidat à la présidentielle de 2017. Non sans rajouter une mise en garde en forme de coup de sabre: "Quoi qu'il arrive". Bigre! Ils n'ont peur de rien, nos leaders politiques. Même pas, semble-t-il, du ridicule. Parce qu'enfin, croire que le bon peuple n'attend que ça - la manifestation supplémentaire d'un ego -, dans un quotidien où l'on sait à peine de quoi sera fait le lendemain, relève au mieux de l'immodestie, au pire de l'insolence délibérée.

    Mais que dites-vous? Qu'il ne s'agit que des primaires UMP? Oui, c'est vrai, l'ancien Premier ministre a aussitôt infléchi sa posture par un tweet, qui... ne change rien à l'affaire. Après sa déclaration nippone, l'ex-"collaborateur" de Nicolas Sarkozy aura bien du mal, en effet, à faire croire qu'il est davantage préoccupé du sort de la France que de son propre avenir. Elevé par Akihito au rang de "Grand cordon de l'ordre du Soleil levant", le promu de Tokyo se voit déjà empereur des Français. Sans doute faut-il lui rappeler qu'il reste quelques longues années avant l'échéance en question. Et que, sous nos cieux, par les temps qui courent, c'est carrément l'équivalent de l'ère Meiji. D.P.

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6 mai 2013 1 06 /05 /mai /2013 21:06

 Lui, la seule transparence qu'il revendique, c'est celle du lagon. A presque 82 ans et équipé d'un lot de casseroles à faire pâlir le vainqueur de Top Chef, Gaston Flosse revient aux "affaires" (les guillemets sont de circonstances). Même si les chiffres des élections territoriales sont encore provisoires, le résultat définitif ne fait  plus de doute: le sénateur autonomiste proche de Jacques Chirac sera bel et bien le prochain président de la Polynésie.
   Evidemment, il n'y a pas beaucoup de place, dans une métropole accaparée par "les" un an de François Hollande à l'Elysée, pour s'indigner de cette situation relevant, au demeurant, de la démocratie. Pourtant, à la réflexion, Flosse promu sauveur dans son fief, c'est un peu comme si, ici, on appelait Jérôme Cahuzac pour nous sortir de l'ornière.
   Bah! de nos petites prérogatives citoyennes, le "vieux lion" s'en fout. Lui, il croule autant sous les condamnations que sous les félicitations. Aux dernières nouvelles, il aurait même reçu un coup de fil chaleureux du ministre des Outre-mer, Victorin Lurel. Gaston, y'a l' téléfon qui son! D.P.

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5 mai 2013 7 05 /05 /mai /2013 22:32

   Un an! Un an, d'habitude, c'est tellement important qu'on met le pluriel On ne dit pas qu'on célèbre le premier anniversaire, mais qu'on fête "les" un an. Nul risque que François Hollande se singularise ainsi douze mois pile après son accession à l'Elysée. Car quand bien même se doutait-il que ce serait dur - prédiction murmurée la mine grave, entre deux anaphores enthousiastes - , il ne pouvait imaginer un tel plongeon dans les sondages, une telle contestation de son action ; bref, un aussi profond désamour.
   Quand va-t-il mener une véritable politique de gauche? A quel moment prouvera-t-il qu'il n'oublie pas ses promesses?  Est-il si différent de son prédécesseur? A ces questions, les plus fréquemment entendues en cette très symbolique date, s'en ajoute évidemment une autre: comment tient-il? Comment un homme, sur qui repose le devenir d'un grand pays en crise, peut-il oeuvrer sereinement dans ce climat, non seulement de perpétuelle défiance, mais aussi de hargne mélanchoniste, de cacophonie au sein de sa propre famille politique et, pire, de rupture avec le peuple qui l'a élu?
   Oui, voilà sans doute ce qui étonne le plus aujourd'hui. Qui étonne, qui fait peur ou... qui épate. Car même les plus injustes envers le Président se doivent de lui reconnaître au moins une qualité. Celle qui consiste à demeurer inflexible dans la tempête. De maintenir, selon la formule, le cap. Notamment en répétant qu'à la fin de l'année la courbe du chômage s'infléchira.
   Chiche? En tout cas, ce sera là le vrai anniversaire et si jamais ce pronostic - auquel personne à l'heure actuelle ne croit - se réalise, François Hollande méritera vraiment le gâteau qu'il ne se verra pas offrir en ce sombre 6 mai 2013. Jour sans bougie ni flamme. Jour de flapi birthday to you. D.P.     

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8 avril 2013 1 08 /04 /avril /2013 21:18

     On dirait que la mort de Margaret Thatcher est tombée à pic pour qu'on puisse s'adonner, non sans quelque délectation de circonstance, au petit jeu des comparaisons. Elle, au moins, elle était "de fer". Pas comme notre président "mou". Certes, la conservatrice invétérée qui conduisit les destinées de la Grande-Bretagne pendant onze ans (de 1979 à 1990) fut une dirigeante d'exception. Déterminée, courageuse, inflexible, bien qu'injuste et cruelle aussi. Mais de là à imaginer qu'une telle intransigeance pourrait avoir des vertus dans notre contexte délétère, c'est confondre à la fois les situations et les époques.
   A bien y réfléchir, cependant, nos temps actuels en attente d'un "choc de moralisation" sont pourtant diablement tributaires de l'ultra-libéralisme prôné par la disparue. A tel point que la rumeur qui monte de partout n'est, d'une certaine façon, rien d'autre qu'une variation amplifiée de la célèbre doléance de l'anti-européenne moquée par le chanteur Renaud: "I want my money back!" ("Rendez-moi mon argent!").

   A l'heure des hommages mérités, osons le dire: si notre monde en crise manque aujourd'hui de magie "Maggie", ce serait plutôt avec un seul "g". D.P.

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25 mars 2013 1 25 /03 /mars /2013 23:44

    Il était élégant et voyou, narquois et attentif, intéressant et désinteressé. ll mettait souvent plus de passion à refuser un manuscrit que d'autres en manifestaient pour dire oui. Il lisait la nuit. Il téléphonait à l'aube. Il aimait aimer. Il ne détestait pas détester. Enfant prodige à la crinière d'ado espiègle, il était entré en littérature à dix-sept ans et des poussières avec un petit roman d'atmosphère, Samedi, dimanche et fêtes, aussi faussement léger que les refrains populaires qu'il fredonnait. Son mentor au Seuil, Jean Cayrol, était un grand monsieur jamais tout à fait revenu de la nuit et du brouillard. Jean-Marc Roberts, qui vient de mourir à 58 ans, n'eut de cesse de lui rester fidèle, glissant comme un chat de son activité d'écrivain à celle d'éditeur, d'une enseigne germanopratine à sa concurrente, d'un coup éditorial à une courageuse découverte, d'un jubilant dilettantisme à une haute responsabilité.

   Joueur de poker aussi bien avec les cartes qu'avec les bouquins, l'ex-tireur de ficelles de la foire des prix d'automne devenu patron de la maison Stock ne se départit jamais ni de sa désinvolture, ni des ses jeans. Du bleu, il en mettait aussi sur ses couvertures où, comme dans la vie, il s'accommodait fort bien du puzzle des familles recomposées. Vassilis Alexakis, Laurence Tardieu, Philippe Claudel, Nina Bouraoui, Christian Garcin, Gérard Guégan, tant d'autres pour qui il s'enthousiasma - ou se fâcha, comme Christine Angot. A Brigitte Giraud, qu'il découvrit en 1999, il offrit une collection de défrichage, "La Forêt", comme on confie un enfant sur qui veiller.
    Les siens, d'enfants, chahutaient dans ses épatants romans aigres-doux hantés par le père qu'il n'eut pas et qu'il s'efforça ensuite d'être au mieux, lui qui s'avouait pourtant volontiers plus doué pour son job que dans ses amours. Sa dernière pirouette fut le lancement du sulfureux Belle et bête de Marcela Iacub. Il eut juste le temps de se délecter en encaissant les coups et comptant les points. Sa confession finale, écrite pour la première fois sans cigarettes et magnifiquement dénuée de toute compassion, vient de paraître. Un récit de bonheurs resurgis et d'ombres qui rôdent. "Tumeur 1, saison 1 (...) Tumeur 2, saison 2". Le titre, Deux vies valent mieux qu'une (Flammarion), tire insolemment la langue à la camarde.
   Enfin, ultime élégance, l'ami de François-Marie Banier, l'auteur d'Affaires étrangères (Seuil, 1979) ou des Seins de Blanche-Neige (Grasset, 1994) s'est éclipsé au tomber de rideau du Salon du Livre et, mieux encore, au moment où Aurélie Filipetti, qui figure à son "catalogue", propose un plan en faveur des librairies indépendantes, ce qui était depuis longtemps le combat de celui qui vient de plonger dans l'infini bleu nuit grave des mots et du silence. D.P.    
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14 mars 2013 4 14 /03 /mars /2013 22:14

Le pape François, au lendemain de son élection, durant sa première messe à la Chapelle Sixtine devant 114 cardinaux. (CTV / Capture d'écran)  A peine élu, le nouveau pape s'est un peu dévoilé. Et, en même temps, il s'est déjà dépouillé. Fini le "1er"  accolé à son nom. Ce sera François tout court. C'est lorsqu'il y aura un numéro deux que resurgira le millésime initial. Il faut dire que faire identité commune avec un roi de France n'offre pas beaucoup d'avantages.
   Plus grave: l'image lisse du jésuite des pauvres, qui prend l'autobus et aime les stades de foot, s'est retrouvée d'emblée écornée à l'heure de sa première homélie improvisée. Lors de la dictature argentine, entre 1976 et 1983, celui qui offiçiait alors à la Compagnie de Jésus dans son quartier natal et pauvre de Bajo Flores ne se serait pas vraiment opposé - doux euphémisme - au régime du général Videla. Les "mères de la place de Mai" survivantes ne semblent, en tout cas, pas prêtes à lui accorder l'absolution.
   Le successeur de Benoît XVI devait s'y attendre. Celui qui occupe le trône de saint Pierre se doit d'être transparent. Y compris, d'ailleurs, sur sa santé. Ainsi, a-t-on appris qu'il vit, depuis l'âge de vingt ans avec un seul poumon.
   Pourvu qu'il ait - au moins - deux coeurs. De toute évidence, le pape "normal" Jorge Mario Bergoglio en aura besoin. D.P. 

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13 mars 2013 3 13 /03 /mars /2013 21:56

  Ah! ce rituel, très théâtralisé, avec rideau qui bouge et tout le tremblement, là-haut sur la loggia dominant la foule sainte... C'était un peu, pardonnez la comparaison, "The Voice"  au pays de Saint Pierre. Sans parler de cette annonce du protodiacre à y perdre son latin. François 1er, vous êtes sûr? Déjà les réseaux sociaux ironisaient: "Pourquoi pas Henri IV tant qu'on y est? Ralliez-vous à mon panache de fumée blanche..."
   Il n'y avait pourtant, évidemment, aucune référence à notre royauté de la part de Jorge Mario Bergoglio, l'archevêque argentin de 76 ans qui, après avoir décliné pareil honneur il y a huit ans, n'a rien souhaité d'autre en choisissant ce nom que s'inscrire dans le sillage du "Pauvre d'Assise". Beau symbole, s'il en est, que cette volonté affirmée d'un retour aux valeurs de la simplicité et de l'humilité en ce vieux monde bouffi d'arrogance vaine qui est le nôtre.
   Et puis, plus historique encore, en élisant ce mercredi soir un pape jésuite venu des Amériques, les115 cardinaux ont osé rompre avec une tradition européenne longue de 1300 ans. Cette fois-ci, à n'en plus douter, au Vatican, le changement, c'est maintenant. Allez, bienvenue à cet autre François! D.P.

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Texte Libre

Ces révolutions que

nous n'avons pas vu venir

   De retour à Bény, en ce bel hiver de givre, je relis cette carte postale que mon père garde, avec celles des étés précédents, sur le buffet de la cuisine. "Sous le ciel encore chaud de la Tunisie, nous pensons bien à toi. Ici, on ne se croirait pas à la veille de la Toussaint. À bientôt. On t'embrasse". Des mots tout simples, écrits comme toujours à la hâte, au moment de reprendre l'avion. 

   C'était à peine trois mois plus tôt. Du Cap Bon où nous faisions halte, nous avions effectué de cahotants trajets à travers le pays. Le Temple des eaux au pied du djebel Zaghouan. Le site romain de Dougga, pur poème de pierre, de vent et d'oliviers, où Abdallah, notre guide, nous avait imposé une visite pour le moins exhaustive. Les villages poussiéreux où la population s'ennuie sous les palmiers flétris. Les charrettes, les bourricots, les antiques mobylettes. La pauvreté, la dignité et, pensions-nous, la résignation.

     La résignation? Eh oui, même lorsqu'on est le témoin d'un régime sans ambiguïtés, il n'est pas toujours si simple de pressentir l'histoire en marche. Avec le recul, pourtant, il y avait eu des scènes éloquentes. Ces barrages de police un peu partout, justifiés alors par un enlèvement d'enfant. Ce jeune diplômé quêtant quelques dinars dans les majestueuses ruines de Thuburbo Majus et qui se cachait pour aborder les "nantis" que nous étions à ses yeux. Un feu couvait en lui, c'est sûr. Il n'aurait peut-être pas fallu grand-chose pour qu'il parle. Mais nous étions pressés, comme souvent.

     Et, disons-le aussi, la méfiance nous gagnait. Un soir, du côté de la cité viticole de Grombalia, un 4X4 aux vitres fumées avait rattrapé notre "Symbol" de location. Une impression se confirmait: nous étions suivis. Sans doute vaut-il mieux ne pas écrire "journaliste" à la rubrique "profession" sur les fiches de douanes à l'arrivée lorsque, quelques mois plus tôt, on a utilisé le mot "dictature" pour rendre compte de la dernière parodie de réélection présidentielle au palais de Carthage.

     Les touristes européens flânaient dans les souks. Les cornes de gazelles étaient sucrées, le vin gris de Mornag montait à la tête, octobre avait de superbes rousseurs de désert et la tiédeur des plages invitait à fermer à demi les yeux. Que voulez-vous, c'est comme ça: exportées sur place, les plus solides notions de droits de l'homme se dissolvent parfois dans le bleu de la mer...

     Pour notre part, nous aurions dû prêter davantage attention aux ardents regards noirs de toute une jeunesse rivés aux téléphones portables. La "génération Ben Ali dégage!" préparait, dans la retenue, le grand soir arabe. Le fantoche président de fer était encore omniprésent. Piètre sosie d'un acteur de série B aux cheveux teints, posant, la main sur le cœur à chaque coin de rue, dans chaque lieu public, à côté des pubs pour les biscuits "Tigato" et pour les firmes corrompues se partageant le gâteau.

     Et voilà. Maintenant nous sommes au début 2011. Dans l'odeur du jasmin et de la poudre, dans le bruit des youyous et des balles, la Tunisie a fait sa "Révolution Facebook". Bonheur de découvrir ces incroyables images à la télévision qui en rappellent d'autres. À Berlin non plus, nous n'avions rien vu venir en novembre 1989. Pas plus qu'à Bucarest le mois suivant. Pas plus qu'au Caire ces dernières semaines...

     Nous parlons de tout cela, ce soir, dans cette ferme de Bresse où, depuis plus de trois ans, mon père veille seul avec son chien et ses cartes postales. Celle-ci, un peu plus ancienne, a été postée de Louxor: "Le printemps égyptien est doux. De part et d'autre du Nil, des merveilles nous attendent. À bientôt. On t'embrasse". Tout à l'heure, il nous rappellera comment lui aussi a retrouvé un jour la liberté. C'était en janvier 1945. L'armée russe avançait. Les portes du stalag de Silésie où il venait de passer plus de cinq ans s'ouvraient. Il allait encore mettre plus de quatre mois pour traverser, à pied et la faim au ventre, un no man's land de charniers, de ruines et de spectres hagards.

     Mais ceci est une autre histoire, direz-vous. Bien sûr. N'empêche, la Liberté, d'où qu'elle vienne, d'où qu'elle revienne, est la même. Au Nord ou à l'Est hier. Au Sud aujourd'hui. Dans nos sursauts collectifs. Dans nos émois partagés. Par l'étroite fenêtre aussi, parfois, de nos petites perceptions occidentales. D.P.

(Cette chronique a été publiée

dans l'hebdomadaire "Voix de l'Ain",

n° 3433, semaine du 11 au 18 février 2011). 

  

La carte de la gloire,

le territoire de l'oubli

   Le triomphe de Michel Houellebecq nous réjouit. Nous fûmes suffisamment déçus par ses échecs au Goncourt en 1998, avec Les Particules élémentaires, et en 2005, avec La Possibilité d'une île, pour ne pas nous féliciter de sa victoire, lundi dernier, à la troisième "tentative". Et cela d'autant plus que La Carte et le territoire (Flammarion) est un roman, à la fois désenchanté et jubilatoire, qui s'inscrit à merveille dans l'air du temps de ce mois de novembre 2010 où, sous la résignation apparente, se profile une très énergique "extension du domaine de la lutte".
   Le lendemain du prix, nous écoutions l'"heureux"  lauréat, sur France Inter, exhorter les auditeurs à ne jamais baisser les bras. "Ne vous laissez pas emmerder, soyez libres!", clamait-il. Magnifique, Michel! comme dirait Drucker qui ne va sans doute pas tarder à programmer un"Vivement dimanche"  houellebecquien. Il faut dire que ce matin-là, le malicieux écrivain à la paupière lasse comme ses anoraks réussissait une sacrée performance. Il volait carrément la vedette au général de Gaulle dont on célébrait pourtant, un peu partout ailleurs, le quarantième anniversaire de la disparition. Et lorsque l'invité déclara un brin péremptoire: "On n'a pas de devoirs envers son pays, on est des individus, c'est tout!", on a bien cru entendre, en bruit de fond radiophonique, le héros de Colombey se retourner dans sa tombe, pour autant que sa gigantesque stature posthume le lui en laissait le loisir.
   Tant pis pour "l'homme du 18 juin", c'est celui du 8 novembre qui était ici à l'honneur! La gloire est ainsi faite. L'enthousiasme du moment peut balayer d'un insolent revers de manche de parka fripée la majestuosité d'un uniforme. Voilà bien à quoi nous songions en écoutant ce drôle de fan de Jean-Pierre Pernaud et de Julien Lepers nous rappeler que "la France est un hôtel, pas plus".
   Injustice? Affaire de circonstances, c'est tout, évitons les grands mots. D'ailleurs, s'il y en a un qui est déjà rompu aux fatals soubresauts de la renommée, c'est à l'évidence Michel Houellebecq lui-même. "C'est curieux comme les choses changent..." fait-il dire au père de son double, à la page 217 de son opus désormais ceint de la prestigieuse bande rouge. Oui, les choses changent vite et bien malin qui pourrait évaluer la durée du rayonnement de celui qui, il n'y a pas si longtemps encore, était conspué à l'unanimité, ou presque.
   Comment pouvait-on, dans un contexte analogue, ne pas penser, au moment de l'attribution du prix, à un lauréat précédent qui vient de disparaître dans une assez scandaleuse indifférence? Lorsqu'il fut sacré, en 1968, pour Les Fruits de l'hiver, lui aussi capta tous les regards. Lui aussi éclipsa momentanément de Gaulle, avant que la chienlit ne déferle. Lui aussi fit des déclarations brutes de décoffrage. Lui aussi pesta contre les travers de la société du moment. Lui aussi réhabilita l'âme des provinces et des bourgades. Lui aussi fut traité de populiste. Lui aussi aimait les chiens. Lui aussi lorgnait vers l'Irlande. Lui? Il s'appelait Bernard Clavel et il a signé plus de quatre-vingts ouvrages dévorés, loin des chapelles, sinon celles du Jura aux toits de pierre et de bois, par des millions de gens.
  Comprenons-nous bien: il ne s'agit pas de comparer les mérites respectifs du "dépressif" du Gâtinais et du bûcheron franc-comtois. Leurs oeuvres, pas plus que leurs démarches, leurs postures et leurs convictions - quoi que... - n'offrent de vraies similitudes. Qu'on nous permette simplement d'y mieux mesurer, parfois jusqu'au vertige, l'indécent grand écart auquel sont soumises, au fil des ans, ces notions floues que sont, en art, le goût et la reconnaissance, l'emballement et la postérité, le lâchage et la fidélité.
   Allez, terminons par une hypothèse. Et si, un de ces quatre, Michel Houellebecq rédigeait un vibrant éloge de Bernard Clavel? Dans La Carte et le territoire, il rend bien un hommage aussi inattendu sous sa plume que mérité pour l'intéressé, à un autre laissé-pour-compte de l'ingrat monde des Lettres: Jean-Louis Curtis (1917-1995). Curtis avait lui aussi obtenu le Goncourt. C'était en 1947 pour Les Forêts de la nuit. Ces forêts où il rôde aujourd'hui, si loin des splendeurs de chez Drouant, avec Clavel et tant d'autres, avant que l'histoire littéraire ne rende son jugement dernier. Au minimum dans un siècle ou deux, "particules élémentaires" comprises. D.P.
(Cette chronique a été publiée,

dans une version légèrement modifiée,

dans l'hebdomadaire "Voix du Jura",

n° 3452, semaine du 20 au 26 janvier 2011). 

 

Ferrat, Chabrol:

l'émotion consolatrice
   Drôles d'hommages, quand on y pense. Il y a quelques mois, la France, larme printanière à l'oeil et lyrisme aragonien aux lèvres, n'en finissait plus de saluer Jean Ferrat. La télévision nationale, on s'en souvient, n'hésita pas à retransmettre en direct les obsèques de l'"échappé"  ardéchois, un peu à la façon d'une étape de la "Grande boucle" dans un col cévenol. Et les foules bigarrées ne cessent, depuis, de se bousculer dans l'étroit cimetière basaltique, lors d'un fervent ballet qui ne manquerait pas d'agacer le discret compagnon des petites routes et des pensées rebelles.
   C'était en mars dernier, entre les deux tours d'une élection que les "bonnes gens"  boudèrent en une obstination inversement proportionnelle à celle qu'ils insufflèrent dans leur "au revoir" au chantre de La Montagne. Et voici donc qu'un semestre plus tard disparaît Claude Chabrol, sous un concert de louanges et face une émotion, certes pas tout à fait de la dimension de la précédente, mais néanmoins étonnante par son impact à la fois médiatique et intimiste.
   Holà, que se passe-t-il donc pour qu'un pays peu réputé pour aimer ses artistes - c'est un euphémisme - manifeste ainsi, coup sur coup, sa sympathie et son chagrin? Un tel engouement se justifie évidemment, au-delà de la force des couplets ou des films des deux créateurs, par la somme d'admiration et de proximité qu'ils inspiraient, chacun de son côté. Le premier par son insolente tendresse et ses engagements jamais feints. Le second par son observation espiègle et grinçante de la société. Mais sans doute faut-il voir également, dans ces effets conjugués de complicité populaire, des éléments d'ordre plus circonstantiels. L'interprète de Ma Môme et le cinéaste du Boucher, dans des registres répétons-le fort différents, n'en incarnaient pas moins l'un et l'autre, y compris sans doute jusque dans les propres limites de certaines de leurs oeuvres, une honnêteté, un goût du travail bien fait, un attachement à la mémoire et un indéfectible respect des individus. Autant de valeurs, faut-il le rappeler, qui font particulièrement défaut en une époque de cynisme roi, de politique dévoyée, de chasse aux minorités ethniques, de charters vrombissant d'indécence sur le tarmac glissant des campagnes électorales...
   Impossible de réécouter une chanson de Ferrat ou de se "repasser" un film de Chabrol sans s'imprégner des bénéfiques célébrations de la patience, de la malice, de la tolérance et de la liberté. Et puis, avons-le, nous ressentions une vraie consolation à les voir l'un et l'autre, moustache frémissante ou pipe en bouche, parler soupes d'autrefois, vins de terroir et pourfendre en se marrant "les cons qui n'arrêtent pas de voler et les autres de les regarder", cela en une époque où la fumée conviviale, le verre entre amis et l'humour décapant tombent sous le coup de la loi, alors que la "bêtise d'Etat" entache le pays du droit de Roms. 
   Entre "ombre faite humaine" et "oeil de Vichy", entre "amour cerise"  et adultères provinciales, Jean Ferrat et Claude Chabrol étaient tous deux, à leur manière, d'Antraigues à Sardent, d'éloquents refrains en travellings suggestifs, inscrits à l'inventaire de nos monuments historiques familiers. Continuons à nous précipiter pour la visite en groupes de leurs battements de coeur, de leurs ricanements, de leurs univers, de leur exemplarité. Alléluia et Moteur! D.P.

   

 La rentrée littéraire,

quelle vacherie!
 Elle est retrouvée. Quoi? La rentrée littéraire qui n'a, avouons-le, pas grand'chose à voir avec l'éternité rimbaldienne. Les libraires transpirent. Les attachées de presse s'enfièvrent. Les chroniqueurs frottent leurs lunettes et affûtent leur sens critique. Un peu partout on compte, on compare, on spécule. Au juste, 701 romans, dont 497 français, ça fait combien de plus, de moins ou de pile poil pareil que l'année dernière qui, elle-même, etc. Drôle de phénomène bien de chez nous que cette espèce de foire d'automne où l'on remplace les bestiaux par des bouquins et les viriles clameurs des enchères par des maquignonnages autour des prix. Palpez un peu cette Nothomb, vous m'en direz des nouvelles. Et le dernier fleuron de la race Houellebecq, visez-moi cette encolure. 
   S'il y en a une qui ne risque pas de s'offusquer de la métaphore bovine, c'est bien Claudie Gallay. La petite femme aux yeux bleu pervenche, propulsée directement de ses terreuses origines nord-iséroises aux "déferlantes" du succès, a écrit son nouvel opus, L'Amour est une île, (Actes Sud), dans sa bergerie du Charolais. Avec des broutards crème meuglant sous sa fenêtre. Avec un ciel pluvieux comme vache qui pisse. La-bas, du côté de La Clayette et de Semur, il y a les prés sans Saint-Germain. Et les éleveurs, qui tordent leurs casquettes à l'heure d'écorner leurs troupeaux, se fichent de l'embouche romanesque comme de la première litière de leur stabulation.
   Ils ne dévoreront ni Despentes, ni Forest, ni Volodine. Ni Linda Lê, ni Adam, ni Claudel. Et encore moins Breat Easton Ellis et J.M. Cootzee. Pas le temps. Propos un brin savants. Bref, un monde qui n'est pas le leur. Claudie, ce n'est pas pareil. Elle est presque d'ici. Elle cause comme l'ultime épicière du coin qui fait dépôt de pain et de journaux. Pas mince, le compliment.
    Cette fois-ci, c'est vrai, elle s'est embarquée du côté du festival d'Avignon l'année de la grève des intermittents. Evidemment, on s'en fiche un peu sur les rives de la Grosne, de la Guye ou du Grison. Mais sûr, la prochaine fois, elle parlera des gens du cru. A commencer, peut-être, par les habitants de Saint-Ythaire. Saint-Ythaire, c'est entre Bonnay et Curtil-sous-Burnand. 122 âmes en colère contre le projet d'implantation de cinq éoliennes. Un super sujet pour l'écrivain qu'on a même aperçue l'autre soir au "Vingt heures" de TF1.
    Les révoltés de Saint-Ythaire? A moins que ce ne soient les Don Quichotte de Bény. Bény, c'est au coeur de la Bresse, de l'autre côté de la Saône. Là, c'est contre la future Ligne à grande vitesse qu'on se mobilise à coups de calicots et de banderoles accrochés aux barrières des fermes et des villas avec, parfois, des slogans en patois: "LGV, to ka t'nallo!" ("LGV, tu n'as qu'à t'en aller"!).
   Des hélices géantes bientôt essaimées dans le paysage si cher jadis aux abbés de Cluny ou des trains fous écrasant prochainement l'AOC des célèbres volailles aux pattes bleues. Fichue alternative, quand on y pense. D'autant plus que, dans ce décor de pseudo-polar rural, on ne discerne pas la moindre librairie à l'horizon. Alors, dites, où c'est qu'on va les trouver, à Saint-Ythaire, à Bény ou ailleurs, les 701 titres annoncés? Houellebecq a raison: il convient de revoir de toute urgence "La carte et le territoire". Ah! quelle vacherie, par ici, la rentrée littéraire. (Fin août 2010). D.P.

 

Quelques nouvelles de par ici
 
 
    Je vais vous donner un peu des nouvelles de par ici. C'est où par ici? C'est chez moi. Enfin, je veux dire pas loin. A la rigueur juste à côté. Le décor, vous le connaissez. Il y a un village avec son clocher vaguement roman. Le presbytère transformé en gîte rural. L'épicerie où l'on vend des caramels pour les gosses et des asticots pour la pêche. Le calme règne jusqu'au milieu de l'après-midi. C'est à ce moment-là que les tracteurs ramènent les voitures de foin dans les fermes. Les travaux agricoles, cette année, quelle galère: on est passé directement de l'hiver du mois de mai à la canicule du solstice! Vers dix-huit heures, dix-huit heure trente, les gosses font des pirouettes à bécane et les ados, sur la placette, gloussent dans leurs téléphones portables sans jamais déclarer forfait. Ensuite, le boulodrome de fortune prend  doucement des allures de petit G20 provincial.
    Imperturbable, l'employé municipal arrose les fleurs. Ou ce qu'il en reste. Le week-end dernier, des dadais en goguette ont piétiné les terre-pleins. "Saloperie de désoeuvrés!" maugrée Jean en lisant l'entrefilet dans la chronique locale. Jean, c'est le facteur. Après sa tournée, il aime bien prendre un verre. Le seul café qui n'a pas encore baissé rideau aligne trois tables sur le trottoir. Les autres troquets ont tous fermé. Trop de travaux pour se mettre aux normes. En sirotant son panaché, le préposé s'attarde sur le journal du coin. Les décès, les mariages, les naissances, les accidents... Il lit aussi le billet, en haut à gauche de la page 2. Il y a même la photo du chroniqueur qui tient un bouquin dans ses mains. En regardant de près, on découvre le titre et l'auteur. C'est Après beaucoup d'années de Philippe Jaccottet.
    Jaccottet est un immense poète qui vit dans les parages. Mais personne ne le connaît vraiment. Jean s'en fiche. Lui, ce qu'il recherche dans son canard, ce sont les infos pratiques. Ou les échos du conseil municipal. L'annonce des fêtes d'été. Les vide-greniers des alentours. Mais à la Une, il y a cette photo. Un ministre et sa femme "dans la tourmente". Eric et Florence Woerth, ils s'appellent. Pierrot, le patron du café, qui vient faire un brin de causette à Jean, prononce ce nom à sa façon. Il dit "Voerte" et ça sonne un peu comme un hommage aux absinthes verlainiennes d'autrefois. "Tous pareils, hein, y'en a pas un pour racheter l'autre!". Jean, le regard rivé aux résultats du "Mondial" de foot et au classement général du Tour de France, ne répond rien. Ou alors il fait "hum hum" et bien malin qui pourrait comprendre si c'est une approbation ou l'inverse. 
  Rien ne bouge, ou presque. Il y a juste un soupçon d'électricité dans l'air. La grêle est annoncée pour le soir mais, c'est bien connu, "à la météo, ils se trompent tout le temps...". N'empêche, il faut hâter la fenaison. Demain à l'aube, les fourches hydrauliques des colossaux Renault ou John Deere payés à crédit planteront leurs dents dans ces rouleaux herbeux qui, au mitan des parcelles de la PAC, ressemblent aux chignons lavande des aïeules de ce "pays". Ce "pays" qui pleure et qui rit, qui meurt et qui vit. Ce "pays" qui attend les touristes. Ce "pays" en jachère où, dans les villas des lotissements en extension, Internet remplace désormais l'épicier qui faisait jadis sa tournée en klaxonnant à travers des hameaux pleins de vieux taiseux et de chiens tout en gueule. 
  Voilà, ça se passe par ici un jour brûlant de juillet. Plus tard, peut-être, je vous donnerai des nouvelles de par là-bas. C'est où par là-bas? C'est du côté de par ici. Si jamais, un de ces quatre, vous avez l'occasion, arrêtez vous quelques instants, on parlera un peu de Jaccottet. "Faites passer, disait la terre elle-même, ce matin-là, de sa voix qui n'en est pas une. Mais quoi encore? Quelle consigne?" (Juillet 2010). D.P.
 

    

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